Les combats de Saumur
( 18-21 juin 1940 )

 

1) L'offensive foudroyante de la 1 ère Division de cavalerie allemande

 Après avoir franchi la Seine et pris Paris le 14 juin, l'armée allemande marque un temps d'arrêt au sud de Chartres. L'état-major de la 4 ème armée décide d'envoyer les blindés vers l'Ouest, afin de s'emparer de Cherbourg et de Brest et d'empêcher la formation d'un " réduit breton ". Bien qu'on l'ait écrit, aucune unité de Panzer n'est dirigée vers Saumur, mais tout au contraire une formation traditionnelle, la 1 ère Division de cavalerie.
 Cette unité avait été formée en Prusse orientale pour mener l'offensive dans les zones marécageuses de la Pologne. Renforcée, elle regroupe quatre régiments de cavalerie, en partie montés, un régiment d'artillerie pourvu de canons automoteurs, deux bataillons cyclistes, un groupe antichars et deux groupes de D.C.A. ( Dr F. M. v. Senger u. Etterlin jr, Die 24. Panzer-Division vormals 1. Kavallerie-Division ( 1939-1945 ), Kurt Vowinckel Verlag, Neckargemünd, 1962 ( Bibliothèque du S.H.D. à Vincennes ) et article du commandant Even cité au dossier précédent ). Les avant-gardes sont mécanisées et surtout composées de motocyclistes, de gros camions à six roues et de quelques automitrailleuses.
 La 1 ère Division de cavalerie reçoit la mission de foncer vers le sud et de prendre intacts par surprise les ponts de Saumur, de Montsoreau et de Port-Boulet. Sur les routes encombrées de réfugiés et de soldats en retraite, les avant-gardes progressent très vite, malgré deux bouchons de retardement, mis en place par les Français. Elles avancent de près de 200 km en une journée. Les chevaux des régiments montés ne parviennent pas à tenir ce rythme ;Réfugiés de juin 1940, photo prise par un soldat allemand de la 11 ème Division d'Infanterie ils sont en partie abandonnés munis d'étiquettes dans des enclos le long de la route, et les cavaliers poursuivent à bicyclette.

 Les soldats allemands disposent souvent d'un petit appareil photo au format 9x6 ou 6x6 et ils mitraillent d'abondance. A partir d'albums d'anciens combattants, qui n'intéressent plus leurs descendants, on peut découvrir des détails sur leur progression.
 L'auteur de ces deux clichés appartient à la section des transmissions de la 11 ème Division d'Infanterie. Son unité ne se bat pas aux premières lignes ; il prend des clichés à Lille, Beauvais, Les Andelys, Le Mans, Angers, Vivy, Saumur, puis Thouars. Il ne manque pas de photographier les longs convois de réfugiés.

 

 


Offensive allemande dans l'Ouest, lieu non identifié

 

 

 Sous le titre « Vormarsch im Westen - Offensive dans l'Ouest », il présente l'avancée de sa division dans notre région ( à gauche ). On exagère souvent l'importance de l'équipement mécanique des Allemands en 1940. Les troupes d'infanterie se déplacent en partie à cheval, en partie sur des véhicules hippomobiles, en partie à bicyclette. Les blindés du Blitzkrieg ne sont pas là ; ils ont d'ailleurs des problèmes de carburant et d'usure du matériel.

 


La 1 ère Division de cavalerie atteint les faubourgs nord de Saumur le mercredi 19 juin, à 2 h, heure française : la troisème arche du pont Napoléon vient d'être détruite. Malgré sa vitesse, elle ne profite d'aucun effet de surprise. Les chefs de gare de Château-du-Loir, puis de Château-La-Vallière ont prévenu Saumur de son passage. Le peloton du lieutenant Garnier, qui patrouille au nord de la Loire, a aussi constaté cette offensive et se replie en allant passer le fleuve à Gennes.
 La coupure du pont de fer par le Génie françaisQuand les avant-gardes ennemies approchent sans bruit du pont de Montsoreau, le tablier saute en l'air en emportant un cycliste allemand qui s'était aventuré. A 3 h du matin,une travée du viaduc ferroviaire est cisaillée avec précision à ses deux extrémités par les artificiers du génie. La division allemande est plus heureuse à Port-Boulet, où l'explosion insuffisante laisse le pont praticable.
 Pendant toute la journée du 19, le gros des troupes allemandes rejoint son avant-garde ; l'état-major étudie les lieux et prépare son plan de franchissement du fleuve. Il le maintient en dépit d'un contrordre de dernière heure ( les grandes unités allemandes conservent une marge d'initiative impensable dans l'armée française ).
 Sûr de lui, l'état-major de la 1ère Division de cavalerie prend son temps. Le capitaine Detlev von K..., auteur de cette photo, a passé la nuit au château des Rigaudières à Brain-sur-Allonnes.

Etat-major dans la forêt de Vernantes le 19 juin 1940, photo Detlev von K...

 Dans la journée du 19, ainsi qu'il le note, son état-major, se tient au point I B, dans la forêt, à 6 km au nord de Saumur, donc dans les bois de Vernantes. Il s'accorde une petite sieste postprandiale, alors que l'artillerie pilonne la ville.

 

2) Des directives contradictoires

 Dans le camp d'en face, dans la mesure où les lignes de défense françaises s'effondrent, le généralissime Weygand avait donné un ordre de repli général le 12 juin et la mise en défense de toutes les rivières susceptibles de barrer la route à l'invasion. Une résistance sur la Loire est programmée à la fin du mois de mai et le génie tire ses plans pour détruire les 24 ponts placés dans les limites de la IX ème Région.Le colonel Michon Le général Pichon répartit la défense en quatre secteurs et confie au colonel Michon ( à droite ) celui qui s'étend de Candes au Thoureil, soit environ 30 km. Cette défense de la Loire est-elle une résistance symbolique, un bouchon de retardement ou une opération d'envergure ? Les commandants militaires ne semblent guère y croire, dans la mesure où ils y affectent peu de moyens, alors qu'ils disposent encore de troupes importantes dans la région : l'armée de Paris du général Héring, qui n'a guère combattu, se replie alors au sud de la Loire, son état-major est installé à Pleumartin dans la Vienne, mais elle ne participe pas au combat. Dans l'esprit du général Pichon, la défense de Saumur est une opération de retardement, afin de permettre à cette armée de Paris de se redéployer sur le Cher. Les grands chefs ne s'y intéressent guère ; le général Weygand est désormais plus soucieux de ses combinaisons politiques que des opérations stratégiques. En tout cas, alors qu'un univers s'écroule, que les populations civiles sont prises par la panique, que les autorités gouvernementales négocient sans lignes directrices, que les chefs des armées ne songent qu'au repli élastique, des jeunes gens, sans vocation militaire et fraîchement mobilisés, font face et acceptent une résistance périlleuse.
 A grand peine, les défenseurs de Saumur parviennent à récupérer quelques troupes de passage, ainsi que cinq canons de 75, dépêchés depuis Poitiers et restés sans utilité. Malgré des faibles forces, le colonel Michon entend mener sa mission dans l'esprit d'un combattant des tranchées, qui ne veut céder aucun pouce de terrain.
 En même temps, ses supérieurs directs de la direction de la cavalerie, qui se sont eux-mêmes réfugiés à Vallières-les-Grandes, près d'Amboise, lui ordonnent le 15 juin de replier l'ensemble de l'Ecole sur Montauban. Le colonel Michon, qui se refuse à abandonner la ville sans se battre et qui en fait une affaire personnelle, arrache un compromis : tous les éléments combattants restent sur place ; les administratifs, le personnel civil, les archives, les souvenirs et les 827 chevaux partent pour Montauban, et pour un trajet plein de rebondissements. D'autres chevaux les remplacent, ce sont ceux de la cour de Belgique, arrivés par 30 wagons, en compagnie de poneys et de carosses, et installés au paddock.
 Un autre élément contraire intervient le 17 juin, à 12 h 30 sur Radio-Bordeaux : de sa voix chevrotante, le maréchal Pétain, nouveau président du Conseil, déclare qu'il est temps de « cesser le combat » et qu'il a engagé les négociations d'armistice. Ce discours, souvent entendu, a un effet désastreux. Le colonel Michon réunit ses officiers pour leur dire qu'il a pris l'engagement d'honneur de défendre le passage de la Loire et que ces faits nouveaux ne modifient en rien sa position. Les élèves aussi ont envie de se battre, du moins un bon nombre. Et on ne leur demande pas leur avis. Michon a décidé pour eux.

3) Des moyens dérisoires

 Le noyau central de la défense est formé par les Elèves-Aspirants de Réserve arrivés en mai à l'Ecole, structurés en brigades d'instruction et bien encadrés par des lieutenants rappelés du front. Ils sont 790 environ, 550 EAR de cavalerie et 240 du train, armés de leur mousqueton d'exercice, de 40 cartouches, complétés par un bon approvisionnement en fusils-mitrailleurs, en mitrailleuses et en grenades. Ils ne savent pas toujours se servir de ce matériel ; ce sont des anciens combattants de la ville qui leur montrent. Autour d'eux sont rassemblées des troupes très diverses, des tirailleurs algériens en cours d'instruction au camp de Vernantes, un groupe de reconnaissance d'infanterie, un escadron du 19 ème Dragons, les enfants de troupe de l'Ecole qui ont signé leur engagement, des pompiers de Paris. Quelques éléments possèdent du matériel lourd : le Centre d'Organisation mécanique de la Cavalerie, implanté à Fontevraud, est équipé de chenillettes et d'armes antichars ; le 1 er Groupe franc de cavalerie commandé par le capitaine de Neuchèze est une unité mobile qui s'est battue sur la Somme, puis sur la Seine ; privée d'une partie de ses hommes et de son matériel, elle se reconstitue au Coudray-Macouard, mais elle dispose encore d'un escadron motocycliste, d'automitrailleuses de découverte et de pelotons blindés formés surtout de 7 automitrailleuses ACG1 et de 5 chars Hotchkiss.
 Au total, quelque 2 200 hommes sont disponibles au début des opérations. Ensuite, ils sont renforcés par deux compagnies d'Elèves-Aspirants de Réserve d'Infanterie envoyés depuis l'Ecole de Saint-Maixent. Les vieux chefs fourbus sacrifient désormais leurs enfants, qui au moins ne s'enfuient pas au premier coup de fusil.
 Pas de moyens de communication opérationnels ; la radio ne marche pas, les chefs de secteurs utilisent le téléphone public jusqu'à la destruction du central de Saumur, puis ils ont recours à des estafettes motocyclistes, qui se perdent souvent en route, car la carte d'Etat-Major au 1/80 000 ème n'est guère détaillée. Aucun soutien de l'aviation française ; un Potez 63 a survolé la Loire à deux reprises, sans rien faire. A l'inverse, les Allemands ont la maîtrise du ciel, leurs avions survolent la zone, ils mitraillent et bombardent exceptionnellement, mais ils jouent un rôle permanent d'observation.
 Dans cette conjoncture, le chef d'escadrons Lemoyne, qui commande en réalité les opérations, adopte un dispositif simple. Il place les brigades d'élèves-aspirants sur un mince rideau le long du fleuve, un homme tous les 30 mètres. Les débouchés des ponts sont renforcés, quelques points d'appui placés en seconde ligne, les éléments mécanisés formant une réserve à l'arrière. Voici le mortier de 81 installé dans le square du théâtre, vu par Geoffroy de Navacelle, un EAR de cavalerie, qui a pris d'intéressants croquis sur le vif et en a tiré des dessins au mois d'août :

19 juin, le mortier de 81 place du Théâtre

 Cette histoire étant strictement consacrée à Saumur, les opérations dans les secteurs de Gennes et de Montsoreau ne seront pas racontées. Un récit de type Kriegspiel serait parfaitement vain, compte tenu du rapport des forces.

4) Veillées d'armes

 A partir du 14 juin, les éléments engagés aménagent leur secteur de défense. Un barrage antichar en béton est édifié par le génie sur la place du Roi-René dans l'axe du pont Napoléon. Les parapets des quais sont dérasés. Le génie a réquisitionné 1 050 sacs dans les établissements Boret, afin de les remplir de sable ( A.M.S., 5 H 35 ). Le barrage des Sept-Voies est défoncé, afin de remettre en eau le bras nord du fleuve. Les gazomètres, qui pourraient exploser, sont vidés par les soins du directeur René Roussel ; la ville n'a plus de gaz. Plus important, des détachements du 6 ème Génie d'Angers viennent en secret miner les trois ponts. Une escouade place 1 700 kg de mélinite sur les côtés de la travée centrale du pont de fer, au prix de deux journées d'efforts ( deux hommes tournent en permanence la manivelle qui entraîne la passerelle d'entretien sous le tablier, des trains transportant des troupes, des blessés, des réfugiés passent sans cesse au dessus - récit de Camille Thélinge ). D'autres escouades minent la voûte de la 3 ème arche du pont Napoléon et placent des explosifs sous la 3 ème arche du pont Cessart. Pour cette dernière opération, les soldats du génie réquisitionnent une lourde péniche de l'entreprise Fardeau et, pour la traîner, un remorqueur conduit par le père Fardeau ; ils n'ont ramené que le remorqueur, la péniche a été écrasée sous les voûtes du pont ( récit de Maurice Fardeau ).
 Afin de disposer d'argent liquide, le colonel Michon fait retirer à la poste la somme de 765 000 F.
 Les services de santé sont réorganisés ; le médecin-capitaine restera avec les nombreux blessés des hôpitaux militaires ; le médecin-lieutenant Née installe un poste de secours au château de Marson.

 Ces préparatifs, qui annoncent une résistance résolue, inquiètent les autorités civiles. Le sous-préfet par intérim, Cruveilhier, a entendu, le 18 juin, à la radio, Charles Pomaret, le ministre de l'Intérieur du nouveau gouvernement Pétain, déclarer que les villes de plus de 20 000 habitants sont déclarées villes ouvertes. Saumur compte officiellement 17 158 habitants, en réalité nettement moins avec le départ des mobilisés, l'envoi des enfants dans des endroits moins exposés et, en dernier lieu, le déménagement en périphérie de nombreuses familles ; en sens inverse, les réfugiés sont très nombreux, réfugiés du premier repli administratif et social de septembre, foule de réfugiés de l'exode, qui remplissent des salles et campent sur les trottoirs ( sans doute plus de 5 000 réfugiés au total ). Que la ville compte alors 20 000 habitants semble admis par les autorités, tout en étant difficile à prouver. C'est en tout cas l'avis de M. Cruveilhier, qui fait une démarche personnelle auprès du colonel Michon pour lui demander que la défense soit plus apparente que réelle. Il se fait éconduire, le colonel se dit « résolu, lui et ses troupes, à résister jusqu'à la mort » ( R. Milliat, p. 23-24 ). Le même débat avait eu lieu à Tours, qui dépassait largement les 20 000 habitants ; les généraux, qui avaient élaboré leur plan, ont refusé de déclarer la ville ouverte et la cité a été ravagée.
 C'est le chaos à cause des fluctuations gouvernementales : le 19 juin, le préfet Ancel a proclamé Angers ville ouverte, en précisant : « Toute résistance et toute opposition à main armée est formellement interdite et sera sévèrement réprimée par les autorités françaises » ( le Petit Courrier, 20 juin 1940 ). A Cholet, le maire et le sous-préfet découragent quelques soldats qui voulaient se battre à l'entrée de la ville. Si l'on descend la Loire jusqu'à Nantes, les villes sont déclarées ouvertes et les ponts ne sont pas coupés.
 Les relations sont encore plus orageuses avec le maire Robert Amy, qui voit avec inquiétude les préparatifs de lutte dans les rues de sa ville. Le 16 juin, le colonel l'informe que la place du Roi-René et les quais nord de l'île devront être évacués, qu'il doit en avertir discrètement les responsables, mais pas la population, afin d'éviter toute panique. Le 18, il lui remet les pouvoirs de police, afin de se consacrer entièrement à sa mission de combat ; il met à la disposition du maire l'officier de garnison, Arlès-Dufour, et quelques troupes. Ce n'est pas une tâche légère en cette période électrique où les ordres se contredisent : de façon surprenante, la gendarmerie est évacuée vers Parthenay ; les gardes territoriaux, mobilisés en civil, qui surveillent les voies et les ouvrages d'art, sont dissous, afin qu'ils ne soient pas considérés comme des francs-tireurs.
 Robert Amy réunit en urgence dans son bureau le conseiller faisant fonction de sous-préfet, quelques chefs de service et certaines notabilités de la ville ; ils tombent d'accord pour « abandonner toute idée de défendre Saumur en déclarant la ville "ouverte" » ( rapport du sous-préfet du 26 septembre 1940, A.D.M.L., 417 W 17 ). Ils décident de passer au-dessus du colonel Michon et de s'adresser au général Vary, le commandant de la IX ème Région, replié à Poitiers. Par téléphone, ce dernier défend son subordonné et refuse de déclarer Saumur ville ouverte. Amy lui demande alors d'évacuer la population ; nouveau refus du général ( Milliat, p. 26 ). Ce refus est confirmé par un message téléphonique du préfet, remis à la sous-préfecture le 17 à 17h45 : « Toute évacuation services publics interdite. Prendre à cet effet toutes mesures pour fixer population sur place et empêcher départs, notamment par automobiles. Sanctions exemplaires seront prises sur le champ contre réfractaires autorités publiques ayant contrevenu à présent ordre » ( A.M.S., 1 D 44, cité le 6 septembre ). Le gouvernement, sur la demande des généraux, a pour objectif de stopper l'exode et l'encombrement des routes ; après avoir encouragé et parfois organisé cet exode, il l'interdit désormais, mais, ce faisant, il prend la population saumuroise en otage. Robert Amy ne peut plus qu'envoyer l'électricien Lucien Barrault et sa voiture munie d'un haut-parleur demander aux habitants de rester calmes et de ne pas partir, sous peine de réquisition des locaux inoccupés. Vraisemblablement très amer, il organise la municipalité comme suit : le 2 ème adjoint, Auguste Courtoison, ancien gendarme, restera jour et nuit dans l'hôtel de ville, il couche dans la cave de la recette des Finances ; le maire se prépare un point de repli dans la colonie de vacances de Champigny ( d'après le récit de Courtoison, A.D.M.L., 12 W 48 ).

5) Combats dans l'île

 Nous arrivons donc au mercredi 19 juin, vers 0 h 20, quand un officier du génie fait sauter la troisième arche du pont Napoléon, et vers 2 h, quand débouchent les éclaireurs allemands par la route de Rouen ; ils sont accueillis par les tirs nourris des EAR postés dans les maisons du quai opposé ( cette fusillade leur a fait surestimer les effectifs des défenseurs ). Rendus furieux par cette résistance inhabituelle, ils fouillent le quartier de la gare et les environs, à la recherche de tireurs embusqués. La famille de Josiane Davout ( Mes Années Vert-de-gris, vers 2005, p. 33-34 ) s'était réfugiée dans la maison familiale de l'île du Saule ; vers cinq heures du matin, des soldats allemands pleins de rage envahissent la demeure et fouillent les lieux. « A coups de bottes, ils éventrèrent les pots de confiture ; ils discutèrent de notre sort en vociférant et en nous désignant. N'ayant rien trouvé, ni soldats, ni armes, ils nous firent sortir, mains en l'air, et nous placèrent face au mur de la maison. Par geste, ils essayèrent de nous faire comprendre que, si nous étions blessés ou tués, ce serait par les français qui tiraient du côteau juste en face. »
 Au petit jour, une torpédo grise, porteuse d'un panneau blanc, s'avance sur la partie intacte du pont Napoléon, ayant à son bord un officier de la 1 ère Division de cavalerie allemande et un officier français, le lieutenant d'artillerie Belisson, qui vient d'être capturé et qui parle allemand. Selon les cas similaires qui ont été rapportés, ces envoyés, munis d'un porte-voix, viennent annoncer que l'armistice est signé et qu'il n'y a plus lieu de se battre ( alors que les négociations ne sont pas encore commencées ). Un ordre avait mis en garde contre ces manoeuvres, présentées comme ruses de guerre. Paulin Houbié, posté dans l'axe du pont derrière son canon de 25, tire et fait mouche. Les plénipotentiaires sont abattus. Peu après, les canons de 77 et de 105, arrivés à la Croix Verte, au Chapeau et à la Ronde, déclenchent un violent bombardement sur la ville ( voir le dossier suivant ) ; les observateurs français localisent sans difficulté l'emplacement de cette artillerie, mais ils ne disposent pas de moyens de contre-batterie, à part des mortiers de 81, qui ne peuvent atteindre que les premières lignes. Ces tirs dévastateurs sont-ils une punition pour l'attaque contre les négociateurs ? Ce n'est pas du tout certain. Partout, quand une ville résiste, l'armée allemande l'écrase sous les tirs de sa puissante artillerie, qui fait de gros dégâts, d'autant plus qu'elle est renforcée par des mortiers et par les bombes incendiaires de son aviation. Elle le fait aussi à Tours et à Blois.
 Dans l'île, le lieutenant Gérard Liffort de Buffévent, après avoir tenu toute la matinée, renvoie une partie de sa brigade sur la rive sud et se prépare à en faire autant, car il estime avoir rempli sa mission de retardement et car le pont Cessart va sauter. Il en rend compte par un message porté à la Villa des Grandes Brises, rue des Moulins, excellent point d'observation, où le colonel Michon a curieusement installé son P.C. Le messager revient avec l'ordre de réoccuper ses positions sans esprit de recul. Le lieutenant est humilié ; après une nouvelle nuit de veille, il demande des volontaires, traverse le bras d'eau à la hauteur du stade et se lance dans une opération risquée, soit pour neutraliser un mortier adverse, soit pour observer les positions de l'ennemi. Il est tué près de la ferme des Abeilles, en compagnie de l'aspirant Etienne Raveton. Comme le pont Cessart a été coupé le mercredi, vers 18h35, les restes de la brigade traversent la Loire en nageant ou sur une barque. Les autres éléments laissés sans ordres, les tirailleurs algériens, les enfants de troupe, placés à Bouche-Thouet, se retirent également.

6) Le passage du fleuve

 Restés relativement inactifs pendant la journée du 19, se contentant d'écraser la ville sous leurs obus, les Allemands mettent en action leur plan de traversée à l'aube du jeudi 20. Pour point de départ, ils ont choisi Port-Roux, la cale de Villebernier située en face du hameau de Beaulieu ; la traversée est en partie protégée par une petite île. Sans grande discrétion, ils y accumulent un matériel considérable. Il est surprenant que l'état-major français, désormais installé dans l'auberge du Marsolleau, n'ait pas envoyé quelques renforts en face. Les premiers radeaux-sacs qui sont mis à l'eau sont pris sous les feux des EAR du train, alignés sur la berge opposée et appuyés par des tirs de mitrailleuses installées dans les caves Gratien et Meyer ; certains coulent. Jean Ferniot raconte ( longtemps après ) : « J'arme le fusil-mitrailleur qui m'a été confié et je commence à tirer ; il se bloque presque aussitôt. De la barque, on m'a repéré et je deviens cible. Il me reste le mousqueton. Couché derrière mon petit tas de sable, je garnis cet engin dérisoire. Une balle - bien ajustée ou guidée par le hasard ? - frappe l'un des assaillants, qui tombe à l'eau. Je devrais, je suppose, éprouver la griserie du chasseur. Ce n'est pas le cas. » Je recommencerais bien. Mémoires, Grasset, 1991, p. 112.
 La résistance n'est pas longue. Les habitants du Petit-Puy voient une armée de radeaux et de portières traverser le fleuve et ils n'entendent plus de coups de feu. Par deux sentiers, les éclaireurs allemands atteignent le coteau. Jehan Alain, âgé de 29 ans, compositeur et organiste déjà réputé, avait été volontaire pour entrer dans le groupe franc de Neuchèze, dont il assurait les liaisons sur une moto ; il tombe sur les Allemands, quand il débouche auprès du château d'eau du Petit-Puy ; il est tué, alors qu'il tente de s'abriter derrière un muret ( Andrée Trudeau n'a entendu qu'un coup de feu. Bernard Gavoty, Jehan Alain, musicien français ( 1911-1940 ), Editions d'aujourd'hui, 1945, p. 107-111, donne un récit épique ). Colette Mentz-Boizard n'a pas entendu de combats ; Jehan Alain avait seulement une grenade dans chacune de ses poches ( lettre publiée dans S.L.S.A.S., n° 163, mars 2014, p. 131 ).

 

7) Les combats d'Aunis

 Les premières troupes allemandes légères s'implantent sur le coteau. En face, la ferme d'Aunis tient bon, alors qu'elle est pilonnée par les obus, qu'elle flambe en partie et qu'elle est harcelée par des avions. Le secteur est renforcé par l'arrivée de deux compagnies d'EAR d'infanterie de Saint-Maixent, qui livrent un véritable combat, passant à la contre-attaque au sud de la ferme et avançant de 150 mètres. En voici la description par le témoin oculaire Geoffroy de Navacelle :

Aunis, 20 juin, par G. de Navacelle, publié par Milliat

 Les Saint-Maixentais sont épaulés par des blindés du groupe franc, qui s'avancent jusqu'au bord du plateauUn char français détruit près de la ferme d'Aunis, publié par Ch. Gilbert dans "l'Anjou" et tirent sur les radeaux traversant la Loire. Cependant, les Allemands, menacés un temps, ont pu apporter des armes antichars, qui anéantissent plusieurs blindés et décapitent le lieutenant Pitiot, le chef du peloton.

 

 

 

 

 Les chars détruits sont restés sur place pendant un an. Des Saumurois sont allés les photographier ( à droite ). Le jeune Chopin, fils du boucher de la place de Nantilly a pris cette photo interdite représentant le service allemand de récupération des armes ramenant une chenillette depuis la zone des combats ( ci-dessous ).

 

Place de Nantilly, chenillette française en remorque, photo interdite prise par le jeune Chopin, fils du boucher de Nantilly

 Revenons au 20 juin dans l'après-midi. Le repli s'impose, d'autant plus que les lignes de défense sont également percées à Gennes et à Montsoreau.

8) Le repli

 Les troupes allemandes approchent du pont Fouchard et la ville est sur le point d'être encerclée. La brigade du lieutenant Périn, en récupérant dans les maisons des comptoirs, des armoires, des tables, des pièces d'étoffe, des caisses de médicaments, a installé des barricades hétéroclites dans les principales artères de la ville, qu'elle semble vouloir défendre quartier par quartier. A la demande d'habitants entassés dans les caves, le chanoine Moreau, archiprêtre de Saint-Pierre, se rend auprès du lieutenant Périn, installé 22 rue de la Petite-Bilange, pour le supplier de cesser ces préparatifs qui risquent d'entraîner un carnage. D'après son récit, l'abbé lui demande :
 « - De combien de temps pensez-vous retarder l'avance de l'assaillant ?
 - Cinq minutes au plus.
- Et pour cinq minutes, vous allez peut-être anéantir toute une agglomération, lui répondis-je.
- Le lieutenant, poursuit le courageux prêtre, semble ému, réfléchit ; les ordres se succédaient ; les obus pleuvaient et la pression se faisait plus grande.
- Il sera fait suivant votre désir, M. le Curé. » ( A. Girouard, dans Le Petit Courrier, 5 janvier 1941 )
 Le chanoine Martin, curé de Saint-Nicolas, fait une démarche semblable ( Milliat, p. 100-103 ).
 La mairie est désormais muette, car elle est souvent vide : Auguste Courtoison, qui était rentré passer la nuit à la colonie de Champigny, a vu sa camionnette Renault réquisitionnée par le sous-lieutenant de Favitzky. Le secrétaire général A. Roux parcourt la ville pour ramasser les morts et les blessés. Il n'y a pas de combats de rues, car le colonel Michon donne l'ordre de repli dans la soirée. Les derniers défenseurs de la ville repartent par le pont de Saint-Florent. Michon voudrait continuer à se battre et parle d'aller tout seul défendre le portail de son Ecole, revolver au poing. Ses adjoints doivent le calmer. En réalité, l'ordre de repli avait été donné dès 11 h par le général Pichon. « Mais le colonel Michon semblait se situer plus dans la logique d'un combat local « pour l'honneur » que dans celle d'un combat global en retraite, combat plus vaste et plus long, appelé à se poursuivre plus longtemps » ( Gilles Ragache, p. 165 ).
 Au matin du vendredi 21 juin, entrent dans la ville déserte des motocyclistes allemands par le quai Mayaud et des fantassins par le sommet de l'avenue du Docteur-Peton. Ils sont tous très nerveux, ils craignent des tireurs embusqués ( tout comme en 1870 et en 14-18, les troupes allemandes ont constamment eu la hantise des francs-tireurs, d'où leurs réactions féroces ). Des camions débarquent des soldats tout aussi hargneux ; ils lancent des grenades dans les maisons suspectes et commencent à piller. Un officier emmène le procureur Louis Ancelin en side-car à Chinon, car le général Feldt, le commandant de la 1 ère Division de cavalerie, le prend pour un membre de la municipalité et veut des explications sur l'attaque des parlementaires ; il parle toujours de représailles et se calme quand il constate qu'il a en face de lui un ancien combattant de 14-18.
 Pendant ce temps-là, les Allemands franchissent la Loire en masse. Les éléments lourds passent par Port-Boulet. Les troupes légères continuent à partir de Port-Roux.

Franchissement de la Loire auprès de Villebernier, 23 juin 1940 Franchissement de la Loire en amont de Saumur

Verso de la photo du dessus

 

 

 

 

 Le soldat allemand, auteur de ces deux photos, note au verso : « Franchissement de la Loire en canots pneumatiques le 23/6/40, auprès de Villebernier, Saumur ».

 

 

 

9) Reddition et libération

 Les éléments français encore en liaison avec l'état-major sont rassemblés dans le parc du château de Chavigny à Lerné. Après des discussions tendues, le colonel Michon, les derniers blindés du groupe franc et une cinquantaine de side-cars partent vers le sud en convoi et se faufilent entre les éclaireurs allemands. Faute de moyen de transport, les autres restent sur place. Un Feldwebel, un adjudant, et quelques hommes en prennent le contrôle, mais les officiers de l'Ecole tiennent à un rituel. Devant un capitaine allemand, ils déposent les armes, ils font l'appel et organisent un défilé. Les Allemands font marcher les prisonniers dans les environs, sans trop savoir quoi en faire et sans les nourrir. Finalement, ils sont ramenés à l'Ecole de cavalerie, transformée en camp de prisonniers. Et le 4 juillet, ils peuvent repartir en convoi vers la ligne de démarcation et rejoindre, libres, l'Ecole, qui se recompose à Nohic, auprès de Montauban. Ce dernier épisode a reçu des explications diverses et assez embrouillées :

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- Les Allemands étaient plutôt débordés par la masse de leurs prisonniers. Il est certain qu'à l'exception de quelques esprits clairvoyants, tout le monde pensait que la guerre n'allait se prolonger que quelques semaines ; les Allemands n'avaient pas encore mis au point les transferts massifs vers leur pays de cette énorme réserve de travailleurs gratuits. Pour l'instant, la surveillance, exercée par des réservistes, n'est pas bien stricte et de nombreux captifs parviennent à s'échapper sans trop de peine.
- Cependant, cette libération est une mesure générale concernant tout le personnel de l'Ecole. Des officiers prisonniers parlant allemand avaient tissé des liens avec des cavaliers adverses, qui étaient venus à Saumur avant la guerre ; des généraux de la division victorieuse sont venus visiter l'Ecole et le champ de courses de Verrie. Une certaine solidarité entre écuyers de concours aurait pu jouer. On a pu remarquer que les bâtiments de l'Ecole ont été peu touchés par la canonnade ; le convoi de chevaux en retraite, qui était encore loin de la ligne de démarcation, a pu poursuivre sa route. Quelques chefs, comme von Edelsheim, qui, alors lieutenant-colonel, commandait l'avant-garde centrale, étaient francophiles et anti-hitlériens. Placés ultérieurement à la tête de la Bundeswehr, ils ont eu des rencontres cordiales avec leurs homologues français. Ces fraternisations européennes n'autorisent pas à réécrire l'histoire. D'une façon plus habituelle, les grandes unités allemandes n'ont rien de chevaleresque et se comportent avec une extrême brutalité : tout point de résistance est pilonné par de redoutables tirs d'artillerie ; quant aux défenseurs trop pugnaces, on ne leur présente pas les armes, ils sont exécutés, surtout s'ils sont des tirailleurs sénégalais ( la première division de cavalerie est associée aux troupes qui ont fusillé des Africains à Chartres et qui ont malmené le préfet Jean Moulin ). Alors, une faveur exceptionnelle entre cavaliers semble difficile à croire.

- De simples raisons juridiques constituent de meilleures explications. Les clauses de l'armistice étaient alors peu connues et pas si claires. L'Ecole a déposé les armes le 22 juin, le jour de la signature de cet accord. L'article IV stipulait : « Les formations françaises se trouvant dans les territoires qui doivent être occupés par l'Allemagne devront être ramenées au plus vite dans les territoires qui ne seront pas occupés et doivent être également libérées. Avant de se mettre en route, ces troupes déposeront leurs armes et leur matériel aux lieux mêmes où elles se trouveront au moment de l'entrée en vigueur de cette convention. » La date de cette entrée en vigueur n'était pas connue ; le texte dit seulement qu'elle aura lieu 6 heures après la signature d'un accord avec le gouvernement italien ( soit le 25 juin à 0h35 ). Le tracé de la ligne de démarcation n'est pas encore fixé. Un certain flou règne dans cette zone et à cette époque. De Mollans ( p.154-155 ) cite d'autres cas de libérations comparables. Un régiment de territoriaux, enfermé sur le Chardonnet, est également relâché.

- Une autre explication juridique a été avancée : une école est un lieu de formation et non une unité opérationnelle. Les EAR n'auraient donc pas eu le droit de combattre, d'autant plus que les Allemands les considèrent comme des « cadets », des jeunes élèves des écoles préparatoires militaires ( Saumur avait des cadets bien réels, une petite unité de formation d'enfants de troupe : ceux qui avaient moins de 18 ans ont été renvoyés vers Montauban, ceux qui avaient signé leur engagement ont été mis en ligne à l'embouchure du Thouet ). Dire que l'Ecole a combattu par erreur a quelque chose de ridicule, mais cette explication est une fiction franco-française, qui a nécessité un vote tardif du Parlement.
- Daniel Houlet, sergent enfermé sur le Chardonnet, donne une explication légèrement différente dans 30 août 1944 ... Saumur est libérée, p. 9. Les " Cadets " redoutaient d'être pris en otage, à cause de la malheureuse affaire des plénipotentiaires abattus. Le premier commandant du camp, le lieutenant autrichien Eschig, a interprété de façon libérale les conditions de l'armistice.

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 En tout cas, les rescapés se regroupent à Nohic ; ils se racontent leurs exploits, ils les racontent à Redier ; ils demandent et obtiennent médailles et citations ( Ferniot rédige lui-même la sienne ).

10) Rebondissement du conflit entre le colonel Michon et la ville

 Depuis Nohic, le colonel Michon porte plainte contre le maire et des personnalités de la ville, qui s'étaient montrées violemment hostiles à l'autorité militaire. Il ajoute que des manifestations regrettables se sont produites à l'égard de sa famille. En effet, Madame Michon et ses enfants ont quitté Saumur pendant le bombardement ; le colonel doit reconnaître qu'en qualité de chef, il leur avait demandé de rester, mais que le père n'a pas été obéi. Cependant, aucune manifestation hostile n'a eu lieu.
 Dans une lettre à son épouse, un employé civil de l'Ecole rapportait les propos tenus par Michon devant son personnel réuni : « Les gens de Saumur peuvent tous crever... je n'ai jamais admis que le Maire ait demandé que Saumur soit ville ouverte... c'est moi-même qui ai voulu défendre Saumur... ce n'est pas pour quelques pots de fleurs et quelques carreaux cassés qu'il fallait chercher des histoires à ma femme ». Un ancien employé de l'Ecole confirme devant le commissaire de police l'exactitude de ces propos, que le sous-préfet « met sur le compte de la fatigue et de son mépris avoué pour l'élément civil de la population » ( A.D.M.L., 417 W 17 ). Le décès du colonel met fin aux procédures.

11) Eléments pour un bilan

 Le but central du colonel Michon était de défendre l'honneur de son Ecole, qui ne pouvait abandonner Saumur sans combattre. Il l'a fait bien au-delà du nécessaire.
 Sur un plan militaire, l'avancée des troupes adverses a été retardée, avant tout par la rupture des ponts : les éléments lourds devront faire un détour par Port-Boulet. La résistance de la petite troupe du colonel Michon a retardé d'environ 35 heures la progression vers le sud des unités légères d'avant-garde. Cela n'a pas changé grand chose aux conditions de l'armistice. Peut-être quelques prisonniers en moins, encore qu'à ce moment, les Allemands se préoccupaient assez peu de faire de nouveaux captifs. Traditionnellement, les lignes d'armistice correspondent aux zone occupées par les belligérants. Le 22 juin, l'armée allemande atteint Angoulême et la première Division de cavalerie arrive à Royan. Cela n'a nullement empêché Hitler d'aller bien au delà, de s'emparer de Bordeaux et d'une bande côtière atteignant la frontière espagnole...
 Sur le plan humain, on peut donner un bilan précis grâce aux relevés des tombes opéré par le Souvenir français en novembre 1943 ( A.D.M.L., 97 W 66 ). Sur l'ensemble du secteur, les troupes françaises ont eu 50 morts. Si l'on s'en tient à la seule zone de Saumur et Dampierre, on compte 32 tués, 11 de l'Ecole de Saint-Maixent, 9 EAR de cavalerie, 9 combattants du 1 er groupe franc, 1 EAR du train, 1 tirailleur nord-africain et 1 artilleur. Le plus gradé est lieutenant et la plupart n'ont guère que 20 ans.
 Dans le camp allemand, pour la journée du 20 juin, la 1 ère Division de cavalerie compte 18 tués, dont 7 sapeurs du génie ( commandant Even ). Quelques uns d'entre eux sont morts à Montsoreau ou à Port-Boulet. On peut évaluer ses pertes saumuroises à une douzaine d'hommes.
 Un nombre important d'autres soldats français a été enterré à Saumur du 18 au 25 juin, ce sont des blessés décédés à l'hôpital et au collège de Jeunes Filles. Il n'y a pas lieu de les compter parmi les pertes des combats de la Loire.
 A l'inverse, pour un bilan complet, il faudra prendre en compte les victimes civiles, que nous allons étudier au dossier suivant, qui présente un autre aspect des combats.

 

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