Le présent dossier cherche à présenter les choix municipaux des Saumurois et les buts poursuivis par les édiles successifs.
1) Les modérés à la Mairie
Les élections
municipales d'avril-mai 1945, déjà racontées
en détail, marquent un tournant : la gauche, et en
particulier les radicaux, perdent la Mairie, qu'ils avaient contrôlée,
en dépit de rares entractes, pendant trois quarts de siècle.
A leur place, la " liste d'Entente républicaine et
d'action sociale ", dominée par le MRP, l'emporte
largement et le 18 mai 1945, elle installe à la Mairie
Emmanuel Clairefond, directeur commercial de Tézier-Frères
( à droite ). Selon la sous-préfecture,
le nouveau Conseil municipal est composé comme on peut
le voir à gauche
Ce conseil était
présenté comme provisoire. Le renouvellement municipal
du 19 octobre 1947 se fait selon un système compliqué
de proportionnelle de liste à un tour avec panachage autorisé.
Le paysage politique a évolué : le RPF, le parti
du général de Gaulle, est en pleine ascension et
obtient l'appui d'une majorité des radicaux. Leur liste
commune regroupe en alternance un gaulliste et un radical. Sans
obtenir des succès aussi éclatants qu'à Angers
ou à Paris,
elle arrive en tête et obtient 10 élus, devançant
la " Liste républicaine sortante "
de Clairefond et de ses amis ( 9 sièges ), alors
que la gauche, désormais divisée, ne fait que de
la figuration.
Majoritaire en élus,
le RPF serait en droit d'exiger la Mairie. Cependant, son leader
local, l'amiral André Commentry, a réuni sur son
nom 3 362 voix, alors que le maire sortant le devance avec 3 513
suffrages personnels ( le panachage permet d'exprimer des
préférences ). « Nous n'avons pas voulu
en nous maintenant dans une attitude intransigeante être
des diviseurs », déclare l'amiral ( Courrier
de l'Ouest du 27 octobre 1947 ). Clairefond exige de garder
sa mairie et l'obtient. En réalité, ainsi que le
suggère la presse, en cas de duel frontal au Conseil, il
aurait obtenu des voix de gauche et l'aurait emporté sur
le leader du RPF, présenté comme très conservateur
et tenant parfois des propos d'extrême droite ( René
Marnot, « Une belle Figure de Marin, le Contre-Amiral André
Commentry », S.L.S.A.S., fév. 1976, p. 14-26
). Le maire sortant avait déjà fait des ouvertures
à gauche et reconduit un ancien adjoint de Robert Amy.
L'amiral Commentry reçoit le poste de 1 er adjoint.
Les relations entre les deux homme ne semblent guère chaleureuses.
C'est manifestement Clairefond et ses fidèles qui dirigent
la cité.
Ainsi qu'il l'avait annoncé, Emmanuel Clairefond met au premier rang de ses priorités la reconstruction de la ville. Il obtient des fonctionnaires d'Etat un traitement rapide des dossiers ; les Saumurois se réjouissent de le voir élu député de juin à novembre 1946 ( il choisit de siéger à la Commission de la Reconstruction et des Dommages de Guerre ), puis conseiller de la République de décembre 1946 à novembre 1948, également conseiller général de Saumur-Sud de septembre 1945 à son décès. Clairefond est un homme actif et un bon chasseur de subventions. Les résultats de son action apparaissent tout de suite dans le rétablissement de tous les ponts et plus tard dans le domaine du logement. Il ne se contente pas d'activer la rénovation des quartiers détruits, il programme aussi de nouveaux lotissements, à Millocheau, aux Chapes Noires et aux Violettes. Il achète également le domaine de la Fuye, afin d'y transférer les vieillards de l'hôpital.
Aux élections municipales
du 26 avril 1953, l'accord avec le RPF, devenu l'URAS, est confirmé
et la liste commune l'emporte. Une certaine usure du pouvoir apparaît
cependant : Clairefond est réélu à la
3 ème place, ce dont il est furieux, et la " liste
d'action sociale, républicaine et laïque "
du docteur Seigneur, comprenant des socialistes, des radicaux
et des divers gauche, progresse en passant à 8 sièges.
Emmanuel Clairefond est reconduit à la Mairie avec
15 voix et l'amiral Commentry au poste de premier adjoint avec
14 voix.
Emmanuel Clairefond décède brutalement à Angers dans la soirée du 20 novembre 1953. La nouvelle fait grand bruit.
Le corps du maire est exposé dans la salle du Conseil de l'Hôtel de Ville et la commune prend en charge ses obsèques pour 180 000 F.
Rien
n'est préparé pour sa succession. La presse locale
se demande si l'accord passé entre le MRP et le RPF tient
toujours. Malgré les doutes, il tient en effet, puisque
l'amiral Commentry est élu dès le premier tour avec
15 voix ( A.M.S. 1 D 48 - résultats
erronés dans la presse ). Le voici, à droite,
tel qu'il apparaît sur le trombinoscope de l'Assemblée
nationale.
L'amiral préside deux conseils sans histoires. Le
3 janvier 1954, se déroule une élection partielle
pour remplacer le maire décédé dans le canton
de Saumur-Sud. Jean Clairefond, fils de ce dernier, ingénieur
agronome peu connu dans la ville, se porte candidat contre l'amiral,
qui estime que cette fonction est liée à la Mairie
de Saumur. Cet hiver 1954 est particulièrement rigoureux ;
63,4 % des électeurs inscrits s'abstiennent. Jean
Clairefond arrive en tête et passe au second tour, devançant
de peu le docteur Seigneur, lancé par la gauche en dernière
minute. Furieux de son échec, l'amiral Commentry annonce
le 3 février sa démission à la fois des postes
de maire et de conseiller municipal, alors que dans la ville il
était arrivé en tête. Il ne devait pas beaucoup
tenir à cette charge qu'il avait méprisée
en 1953. La presse locale des 6 et 7 février confirme que
cette démission est irrévocable. Les commentaires
révèlent de vives tensions entre l'amiral et ses
adjoints MRP, qui avaient promis de ne pas susciter de candidature
contre lui. Commentry devient accusateur dans le Courrier de
l'Ouest du 13-II-54 : « dans l'ombre, j'étais
tenu pour adversaire par certaines autorités spirituelles.
J'espère que chacun me comprendra ». L'intervention
du clergé saumurois est clairement mise en cause.
Après ce passage-éclair et ce départ
par surprise, aucun leader ne s'impose pour prendre la suite et
les rivalités entre les MRP et les Gaullistes se réveillent.
Le sous-préfet craint une crise municipale majeure. L'élection
du nouveau maire le 19 février 1954 est mal préparée.
Au premier tour, le marbrier Fernand Angibault, deuxième
adjoint et militant MRP, obtient 9 voix, le docteur Seigneur 7
voix et l'industriel Jean Dechosal, membre du RPF, 3 voix. Les
Gaullistes locaux perdent ainsi la Mairie. Angibault ( à
droite ) est élu au second tour avec 15 voix. Il évoque
« la situation inextricable où nous étions »
et manifeste une modestie qui ne semble pas feinte. Il appelle
à l'ouverture : « Je demande à mes
amis de la gauche de me garder leur estime et de m'aider de leurs
conseils. »
3) Les réalisations de Fernand Angibault
Toujours modeste, Fernand Angibault est élu député, le 2 janvier 1956, sans l'avoir souhaité ( et pour deux ans seulement ). Sans grand éclat, mais avec efficacité, il mène à terme bon nombre de réalisations en cinq années de mandat. Il achève les projets de Clairefond dans le domaine de l'habitat et des constructions scolaires. En janvier 1956, il inaugure le nouveau bâtiment du Lycée d'Etat, il multiplie les écoles ( Clos Coutard, Violettes, Croix Verte, rue Montcel, rue Millocheau, rue Seigneur ). En 1956, il lance le projet d'un lycée technique municipal. Il réalise la nouvelle station de pompage des eaux, il programme l'aménagement de la zone industrielle du Clos Bonnet ; il lance aussi les études sur le quartier du Chemin Vert et, afin d'y varier les types d'habitat, il crée, en décembre 1958, la SIEMS, la Société immobilière d'Economie mixte de Saumur. Bien qu'il laisse un solide bilan, Fernand Angibault ne se représente pas aux municipales de mars 1959.
Avec l'instauration de la Ve République, le mode électoral a changé. Selon l'ordonnance du 4 février 1959, le scrutin à la proportionnelle disparaît au profit d'une élection majoritaire à deux tours, tout en permettant le panachage. Ce système rapporte tous les sièges au courant dominant. Tous les maires suivants exercent au moins deux mandats ; en 12 ans au minimum, ils peuvent imprimer leur marque personnelle, les adjoints jouant un rôle plutôt effacé.
Aux
municipales de mars 1959, le raz-de-marée gaulliste aidant,
la liste de gauche du docteur Seigneur et la liste communiste
de René Mahias font des scores très faibles. La
liste de droite, comprenant 13 sortants, remporte tous les sièges
dès le premier tour. Lucien Gautier ( ci-contre ),
neveu de l'amiral Commentry, déjà adjoint et conseiller
général de Saumur-Sud, élu ayant obtenu le
plus grand nombre de suffrages populaires, est fort logiquement
élu maire le 22 mars 1959.
Au renouvellement de mars 1965, sa liste élargie
à quelques ralliés remporte à nouveau tous
les sièges. Elle est classée comme gaulliste, les rivalités
avec les modérés semblent mises en veilleuse. Une
liste d'opposition, reprochant à la municipalité
sortante son manque de dynamisme économique et conduite
par l'architecte Jean Gounaud, obtient peu de suffrages, moins
que la liste d'Union de la Gauche dominée par le PCF.
Le vaste ensemble immobilier
du Chemin Vert est construit à cette époque. Lucien
Gautier achève l'hôpital de la Fuye, qui s'avère
aussitôt insuffisant et achète les terrains de l'hôpital
suivant. Il construit la piscine de l'île d'Offard, la Bibliothèque
municipale, l'Ecole de Musique et la M.J.C. Il aménage
le boulevard Delessert. Il commence les travaux du secteur sauvegardé
en centre-ville. Il se bat avec énergie pour conserver
à Saumur le Cadre Noir et parvient à arracher la
promesse de la création de l'ENE. Il doit faire du chantage
pour obtenir la décision théorique de construire
une seconde ligne de ponts. En 1965, la création d'un district
urbain de vastes dimensions semble témoigner d'une volonté
d'ouverture, mais cette unification est imposée par les
autorités supérieures.
Malgré ces réalisations effectives ou en attente,
la ville va mal ; elle est frappée par la crise plus
tôt que l'ensemble du pays. Les industries traditionnelles
sont en déclin et une seule grande entreprise nouvelle
est venue s'installer.
Dans les années de 1968 ( effondrement du pont Cessart ) à 1971, les Saumurois prennent une claire conscience du déclin de leur ville, et en rendent responsable Lucien Gautier. « Il y a longtemps que certains milieux influents de Saumur s'accommodent fort bien, en fait, de la non-industrialisation de la ville, tout en reprochant avec une parfaite mauvaise foi au Maire de ne pas réussir à implanter des usines », écrit le préfet au ministre de l'Intérieur, le 3 avril 1971 ( A.D.M.L., 417 W 43 ). A la veille des nouvelles municipales, le maire sortant, sentant le danger, obtient pour le 20 janvier 1971 une audience du cabinet du Premier Ministre, Jacques Chaban-Delmas, qui fait des promesses : l'ENE et le Cadre Noir seront bien installés à Saumur, la deuxième ligne de ponts sera proposée pour l'inscription au VIe Plan, la demande de voir l'arrondissement de Saumur classé en zone I pour les aides à l'industrialisation sera examinée avec bienveillance. Ces deux derniers points restent, on le voit, assez vagues. Le maire sortant met à son programme la création de zones industrielles à Chacé et à Saint-Lambert, dans le cadre du District, ainsi que l'acquisition du camp des Ifs, abandonné par les Américains. Il fait entrer sur sa liste des dirigeants d'entreprise qui se déclarent résolus à industrialiser l'agglomération, dont Lucien Méhel, tout récemment élu président de la CCI.
Au premier
tour des municipales du 14 mars 1971, la liste de la majorité
sortante obtient une moyenne de 44 % des suffrages ;
elle est mise en ballottage et talonnée par la liste
« moderniste »
d'Union pour l'Avenir de Saumur animée par Jean Gounaud
et menée par le gaulliste Roger Rousselle, qui a orchestré
« une campagne tout à la fois violente et perfide
», selon les termes du préfet, et qui réunit
aux environs de 38 % des suffrages. La Liste d'Union des
Forces de Gauche reste marginale avec 18 %.
Surtout, comme les électeurs peuvent encore rayer
des noms et opérer des panachages, Lucien Gautier est sèchement
sanctionné : il arrive 27 ème et dernier
de sa liste. « L'injure, la calomnie, le mensonge sont
hélas quelquefois payants » déclare-t-il
dans
" Saumur-Demain ",
son journal électoral, et il annonce qu'il se maintient
pour le second tour. Le scrutin du 21 mars confirme le premier ;
Lucien Gautier se retrouve en 41 ème position et est
éliminé. Il se consacre désormais à
ses fonctions de sénateur et au Conseil général,
dont il devient le président.
La liste d'opposition UPAS, qui a reçu des voix de
gauche au second tour, obtient trois sièges, mais Jean
Gounaud n'est pas élu.
Insistons un peu sur l'échec de Lucien Gautier, qui
n'était absolument pas prévu par l'inspecteur des
Renseignements généraux ni par le sous-préfet
Bouquin. L'inspecteur prophétise après coup :
« Les griefs formulés depuis quelques années
contre M. Gautier sont, nous le savons, relatifs au manque
d'industrialisation
de la ville et à son équipement jugé insuffisant »
( 23 mars 1971 ). A ce grief majeur, s'ajoutent des
conflits politiques et personnels. Le maire sortant était
au Sénat étiqueté comme " apparenté
UDR ", mais en même temps, il siégeait
au Bureau national des Républicains indépendants
et les Renseignements généraux le classent comme
Giscardien. En tout cas, Lucien Gautier est en conflit avec Roger
Rousselle, secrétaire local de la section UDR, et a refusé
de le prendre sur sa liste. Les " gaullistes orthodoxes "
ont de ce fait rayé le nom de Gautier. Ce dernier est aussi
en conflit avec le Groupement d'Action des Commerçants
et Artisans de Saumur ( qui se plaignent d'un plan de circulation
bouleversant le centre-ville ).
Il a également pratiqué des manoeuvres malencontreuses.
Lors de la cérémonie des voeux, le 31 décembre
1970, il avait déclaré son intention de ne pas se
représenter. Le 2 janvier suivant, il annonce à
grand fracas sa démission de maire et de président
du District urbain ; dans sa lettre au préfet ( non
publiée ), il écrit : « Je
me rends compte, à travers les récriminations permanentes
de mes concitoyens, que je n'ai pas été assez fort
pour faire entendre la voix de Saumur » ( A.D.M.L.,
417 W 43 ). Des rumeurs circulent alors dans la
ville : on dit qu'Edgard Pisani abandonnerait Montreuil pour
se présenter à Saumur. Mais, bien sûr, le
préfet refuse la démission et par télégramme
au ministre de l'Intérieur, il annonce le 19 janvier que
Lucien Gautier sera candidat. Ces manoeuvres de sous-préfecture
ont paru un peu grosses.
Nous n'avons pas ici la place pour développer des considérations de philosophie politique. Il reste évident que partout un troisième mandat passe plutôt mal et est souvent le mandat de trop. Deuxième thème de réflexion : la municipalité de Saumur est presque toujours en harmonie avec la majorité politique au pouvoir ; on ne voit pas bien ce que cela lui rapporte...
Un
peu déstabilisés par l'échec de leur leader,
les 24 élus majoritaires se mettent d'accord au cours d'une
réunion privée pour élire, le 28 mars 1971,
Lucien Méhel ( à droite ), un directeur
de garage soucieux de relance économique, assez éloigné
des joutes politiques, bien qu'inscrit à l'UDF, et peu
enthousiasmé par cette charge. Ce dernier réalise
les promesses de sa liste, il crée des zones industrielles,
il fait venir une foule d'entreprises ( dont la plupart ne
survivront pas - nous en parlons ailleurs ).
La
municipalité
concrétise la fusion par association avec les quatre communes
périphériques. Elle s'efforce de planifier le développement
d'un Grand Saumur dans le cadre d'un Schéma Directeur d'Aménagement
et d'Urbanisme ( SDAU ).
Aux élections municipales de mars 1977, le scrutin porte désormais sur l'ensemble de l'agglomération. Des négociations assez rudes s'engagent entre L. Méhel et l'UDR ; Lucien Gautier menace même de monter une liste contre le maire sortant. Jean Gounaud, après avoir tenté de négocier avec tout le monde, lance une liste, qui obtient peu de succès. La gauche, réorganisée, retrouve du dynamisme et sa liste d'union obtient 34 % des suffrages au premier tour et 40 % au second, à 428 voix de la liste Méhel, qui passe en entier, selon les règles électorales.
Au renouvellement de mars 1983, Lucien Méhel ne se représente pas, gentiment poussé vers la sortie par ses propres amis. Il tente en vain de léguer son fauteuil à Jean Fontaine, le pharmacien de Bagneux. Finalement, le docteur vétérinaire Constantin, après hésitations, mène une liste modérée, comprenant quelques radicaux valoisiens et quelques militants encartés au CDS ou à l'UDF. Cette liste est soutenue publiquement par les deux députés du Saumurois. Aucun accord n'est possible avec Jean-Paul Hugot, qui a pris en main la section du RPR, lancé le groupe " Saumur 83 " et mené une guérilla contre le maire sortant, à partir d'amis dans la place et par une campagne extérieure. Ainsi, La Nouvelle République des 5 et 6 décembre 1981 peut-elle déjà titrer : « Le R.P.R. part à l'assaut de la mairie de Lucien Méhel ».
Au
premier
tour, la liste Hugot l'emporte nettement sur la liste Constantin
( 38 % pour la première, 22 % pour la seconde ).
Une fusion pour le second tour réunit 25 RPR et 14 modérés.
Cette liste remporte
60 % des suffrages au second tour et porte Jean-Paul Hugot
à la Mairie ( à droite ). Ce dernier installe ses
amis aux postes clés et aux fonctions de maire délégué,
sans nul partage du pouvoir. « Depuis votre élection,
tout est noyauté par le R.P.R. », lui écrit
Pierre Constantin, deuxième adjoint ( Nouvelle République
des 9-10 et 11 juin 1984 ).
La liste d'Union de la Gauche emmenée par Jacques
Percereau se maintient à 40 % au second tour, en obtenant
le gros des voix qui s'étaient portées sur une liste
Gounaud, curieusement alliée aux radicaux de gauche. Grâce
au rétablissement du scrutin proportionnel ( avec
prime majoritaire ), la gauche forme un petit groupe de sept
membres. Ainsi, J.-P. Hugot s'installe aux commandes de la ville
pour 18 ans. Après deux échecs électoraux
( aux Législatives de 1978 et aux Cantonales de Gennes
en 1979 ), ce dernier est désormais en position de
force.
Professeur de lettres, enseignant la linguistique à
l'Université d'Angers, Jean-Paul Hugot a enlevé
Saumur à la hussarde, ou plutôt à la Chirac.
« C'est un chiraquien pur teint, écrit Alain
Blanchard dans La Nouvelle République du 3 mars
1983. Le chef peut être fier du compagnon qui, mimétisme
oblige, pousse la ressemblance et l'allégeance jusqu'à
cultiver les mêmes tics et quelques mimiques identiques.
Secrétaire d'une section qu'il a complètement métamorphosée
et membre du comité central du R.P.R., Jean-Paul Hugot
s'essaie aux sociétés de boule de fort, passages
obligés de toute carrière politique en Saumurois. »
Son ami Jacques Chirac vient lui rendre visite au cours d'un voyage
consacré à Fontevraud et à Saumur, les 25
et 26 mai 1998. Vous sourirez en regardant le savoureux reportage
vidéo publié sur Youtube, l'accueil par des
carabiniers de Monsieur, les courbettes nonchalantes d'un cheval
du Cadre noir, la poignée de main républicaine au
député Jean-Michel Marchand et le long bain de foule
final.
Obstiné et homme d'appareil, Jean-Paul Hugot suit de près l'activité municipale de Saumur, tout en étant secrétaire départemental du RPR et membre du comité central du parti, conseiller général de Saumur-Sud, conseiller régional, député européen, puis sénateur, mais, malgré ses amitiés haut placées, il n'obtient pas le maroquin ministériel que ses amis lui promettaient. Malgré sa courtoisie, il n'est pas un homme de concensus. Des positions marquées lui sont reprochées : il est membre du syndicat universitaire l'UNI et coprésident de l'Association des élus pour la liberté de la culture, deux organisations proches de l'extrême droite.
Parmi ses réalisations
les plus importantes à Saumur, il aménage le nouvel
hôpital, la piscine du Val de Thouet, le nouveau centre
de Saint-Hilaire-Saint-Florent et un terrain de golf. Il pousse
plus loin les ambitions culturelles de la ville en plaçant Saumur
et sa région au rang de Pôle touristique international
et en obtenant le label " Ville d'art et d'histoire ".
Il transforme la Bibliothèque municipale en Médiathèque.
Il est aussi à l'origine de la Fondation du Patrimoine
et il commande à Christian Renonciat la sculpture monumentale
Archeval inaugurée en 1999.
Aux élections municipales de mars 1989, les élus de l'UDF se montrent critiques sur le fonctionnement de la municipalité et le docteur Constantin songe longtemps à lancer une liste autonome. Finalement, Jean-Paul Hugot parvient à rallier des candidats modérés ; sa " liste d'union pour Saumur " obtient 48,38 % des suffrages au premier tour, mais progresse peu au second ; au final, elle l'emporte avec 51,36 % des voix et 30 élus ( deux conseillers en moins ). En effet, la compétition est vive : au premier tour, une liste soutenue par le Front national arrive à 6,15 % des suffrages, tandis que le PCF se cantonne à 4,48 %. Une concurrence victorieuse aurait pu venir de la gauche socialiste ( le gouvernement Rocard est populaire ). Mais celle-ci éclate par suite de conflits personnels : la liste officielle " Majorité présidentielle " obtient au second tour 33,67 % des voix et 6 élus, la liste " Saumur Harmonie ", avec 14,97 % remporte 3 sièges.
Aux élections suivantes
de juin 1995, J.-P. Hugot est plus heureux : il conduit une liste
d'union renouvelée et il a la surprise de l'emporter dès
le premier tour avec 50,7 % des suffrages exprimés
et toujours 30 sièges. Une liste proche du Front national
obtient 3 % des voix.
La gauche est toujours éclatée. La liste de
la gauche classique, " Saumur autrement ",
est emmenée par Jean-Michel Marchand
( Anjou-Ecologie-Autogestion ),
qui a pris la tête en raison du décès accidentel
de Jacques Percereau. Cette liste fait un score moyen avec 24,6 %
des voix et 5 élus.
Jean-Luc Lhémanne, ancien directeur de l'ENE et
conseiller régional « rocardien »,
mène une liste " Renaissance de Saumur ",
héritière de Saumur Harmonie, tout en étant
très ouverte sur le centre droit. Il n'obtient que 20,7 %
des voix et 4 sièges, deux à des divers gauche,
deux à des Balladuriens hostiles aux Chiraquiens, cela
malgré une campagne active et le recours à des gadgets
publicitaires jusqu'alors inconnus, tel ce jeton de caddie.
7) L'alternance ( depuis mars 2001 )
Les élections municipales,
fixées au 11 mars 2001, s'engageaient dans un nouveau contexte :
la loi sur la parité est mise en application partielle ;
la chute de la population au-dessous des 30 000 habitants
entraîne la réduction à 35 du nombre des conseillers
et un dispositif bizarre, selon lequel le maire de l'ensemble
de l'agglomération est choisi par les 21 conseillers du
centre-ville.
Au terme d'une longue campagne, deux listes seulement sont
en présence, ce qui s'avère peu mobilisateur. Le
taux de l'abstention atteint 39 % dans l'ensemble de
l'agglomération
; en outre, 680 électeurs ( 5,8 % des votants )
déposent un bulletin blanc ou nul, sans doute parce qu'ils
ne se retrouvent dans aucune liste, ce qui représente un
record pour des municipales et un premier avertissement à
l'adresse des politiques.
Le résultat
surprend tous les observateurs : la liste de la « gauche
plurielle », " Construire autrement l'avenir ",
emmenée par Jean-Michel Marchand ( à droite ),
l'emporte très largement avec 54,72 % des suffrages
exprimés et 26 élus. Non seulement majoritaire dans
Saumur-centre, elle voit ses alliés l'emporter au large
à Saint-Lambert-des-Levées ( 58,8 % ),
à Bagneux ( 57,7 % ) et même à
Saint-Hilaire-Saint-Florent ( 52,33 ), dans une commune associée
à forte tradition conservatrice. Seul Dampierre reste fidèle
à la droite. La liste de Jean-Paul Hugot, " Saumur
ensemble ", est nettement écrasée avec
45,28 % des suffrages et 9 élus.
Dans la presse des jours suivants, les analystes se sont
efforcés de rendre compte de ce raz-de-marée. La
municipalité sortante, au bout de 18 ans, souffre d'une
évidente usure du pouvoir ; au cours de son dernier
mandat, elle n'a pas amélioré la situation de l'économie
et de l'emploi, la population continue à décliner.
Jean-Paul Hugot a surtout inauguré des réalisations
fort discutées, comme la liaison Loire-Coteau et son coûteux
tunnel. Il a réservé les postes de responsabilité
à ses amis chiraquiens et les membres de l'U.D.F. se lamentent
toujours : « Malheureusement, à Saumur, le R.P.R.
n'est pas un parti, mais une tribu. Et quand on n'appartient pas
à la tribu, on est exclu », confesse Christian
Brûlard à La Nouvelle République du
30 mai 1995. Laminées, les faibles structures centristes
se sont décomposées et certains de leurs membres
se sont ralliés à Jean-Michel Marchand.
Les
observateurs
n'avaient pas discerné la réelle remontée
de la gauche à Saumur ; Jean-Michel Marchand, enseignant,
principal de collège, avait été élu
député en 1997 en bénéficiant des
aléas d'une triangulaire, mais il avait déjà
obtenu 43,60 % des suffrages dans la ville. Depuis, il avait
fait son chemin, en labourant en profondeur, en diffusant " Initiatives ",
une lettre d'information régulière sur son action
de député, en marquant ses distances avec les surenchères
des Verts. Au contraire, il avait su accueillir des centristes,
ainsi que le notait le président de la CCI dans Le Monde
du 23 mars 2001 : « La droite est plus proche
des chefs d'entreprise. C'est du moins ce qu'on dit. La seule
liste qui en présentait deux, c'était celle de Jean-Michel
Marchand ! Ce dernier n'a pas mené un combat Vert,
mais une campagne adroite. » A sa première réunion
de campagne, une manifestation intempestive de chasseurs n'a pu
que lui faire de la publicité. Il a pu bénéficier
d'une relative neutralité des militaires ( qui représentent
un fort pourcentage de la population, mais qui n'ignorent pas
qu'il a été objecteur de conscience ). Selon les
commentaires du Courrier de l'Ouest, alors que J.-P.
Hugot avait maintenu les Saumurois dans un statut de consommateurs,
J.-M. Marchand leur donnait un rôle d'acteurs, en promettant
une consultation permanente des habitants. Enfin, un porte-à-porte
actif s'est avéré efficace. Ainsi peut s'expliquer
le retour de la gauche aux affaires municipales, dont elle était
écartée depuis Robert Amy.
La gauche se porte plutôt bien alors à Saumur :
au second tour des Législatives de juin 2002, elle obtient
50,57 % des suffrages exprimés dans l'agglomération
( alors qu'elle subit un revers à l'échelle
nationale ). Ces élections confirment le déclin
politique de Jean-Paul Hugot : candidat comme UMP dissident,
il demeure majoritaire dans la ville, mais il ne parvient pas
à s'emparer du siège de député de
Saumur-Sud. A nouveau en échec aux cantonales de 2004,
il abandonne la vie publique.
Tout juste installée, la nouvelle municipalité est confrontée à l'écroulement soudain du rempart nord du château, le 22 avril 2001. L'énorme chantier de reconstruction est achevé le 23 juin 2007. L'autre grande entreprise urbaine est le remodelage complet du quartier du Chemin Vert, intégré dans le Plan de Rénovation Urbaine ( PRU ) de 2003. Ces grands travaux obligent à de nouveaux emprunts, dont certains se sont avérés toxiques. La nouvelle municipalité s'efforce d'entretenir des rapports de plus grande proximité avec les habitants ; toutefois, sa structure dirigeante manifeste une certaine instabilité.
L'état des finances
municipales est un thème majeur des nouvelles élections
de mars 2008. Michel Apchin, UMP, ancien chef d'entreprise, y
anime des listes d'union allant du Mouvement pour la France au
Modem. Au
premier tour,
pour l'ensemble de l'agglomération, il arrive derrière
la liste de Jean-Michel Marchand et de ses alliés des communes
associées. Cependant, selon la règle électorale
en vigueur, c'est l'ancienne commune de Saumur qui fait la
décision ;
la liste Marchand y est handicapée par la présence
d'une liste trotskyste qui obtient 478 voix au premier tour et
qui refuse de se désister en sa faveur au second
( l'analyse des reports de voix prouve
que ces suffrages se sont dispersés ). Au final, la
liste de Michel Apchin ( à droite ) l'emporte
dans le centre et prend la mairie, avec 51,07 % des voix. Le nouveau
conseil municipal est assez diversifié, puisque les listes
associées à Jean-Michel Marchand sont majoritaires
à Bagneux et à Saint-Lambert.
La municipalité Apchin procède à de strictes économies et réduit la dette grâce à une hausse de 15 % des impôts locaux. Le grand chantier de la réfection totale du théâtre, fermé en 2008, est lancé. Cadeau empoisonné fait par la ville à l'agglomération, le théâtre doit devenir un Pôle culturel et artistique et, éventuellement, recevoir l'école de musique. Les travaux prennent d'énormes retards ; la salle à l'italienne, qui ne pourra recevoir que 470 spectateurs, semble destinée à des privilégiés. Pour les autres, un vaste espace d'expositions et d'événements pouvant contenir 2 600 personnes est construit en matériaux légers sur le terrain du Breil ; son extérieur peu avenant suscite des commentaires ironiques, alors que le Pôle culturel revient à 354 euros pour chaque habitant de l'Agglo. La création d'une police municipale était demandée, mais la patrouille équestre en centre-ville était ridicule et, au demeurant, une police n'est jamais populaire. L'installation à la Mairie d'un ancien dirigeant d'entreprise avait suscité l'espoir de créations d'emplois ; les résultats sont minces dans ce domaine, alors qu'en menant une politique écologiste ( économies d'énergie, zone piétonne ), la municipalité prend ses fidèles à contre-pied. Il y a aussi la manière : dans son prospectus du second tour, le maire promet : « Je mettrai dans mes relations avec les Saumurois cette pointe d'humanité et de chaleur qui m'a peut-être manqué, non par indifférence ou arrogance, mais plutôt par excès de prudence et de réserve. »
Les nouvelles élections
municipales de mars 2014 se déroulent sous le régime
de la loi du 17 mai 2013, qui redonne la décision à
l'ensemble des cinq communes associées. Les Saumurois sont,
à l'évidence, déstabilisés ; 37,8 %
d'entre eux préfèrent s'abstenir au premier tour
; 2,83 %, sans doute peu satisfaits par les six listes en
présence, votent blanc ou nul ; le quart des suffrages
exprimés se porte sur des listes protestataires ( Front
national, Parti ouvrier indépendant ) ou sans étiquette.
Autrement dit, plus de la moitié des électeurs inscrits
refuse d'entrer dans les schémas politiques traditionnels.
Cette protestation
aux formes diverses doit faire réfléchir les élus,
les inviter à consulter en permanence leurs concitoyens
et à oublier leur ego au service de l'intérêt
collectif. Dans l'immédiat, ce malaise permet au Front
national d'obtenir un siège au Conseil municipal.
La municipalité sortante est sèchement désavouée
en n'obtenant que 39,9 % des suffrages au second tour, tout
en étant majoritaire en centre-ville : inversion des
tendances, c'est désormais la périphérie
qui choisit le maire. La gauche, minée par des querelles
internes, ne semblait pas mieux se porter : deux listes aux
programmes comparables se présentaient ; deux voix
les séparent au premier tour. En tête, Jean-Michel
Marchand réalise une fusion avec les amis de Jackie Goulet ;
la nouvelle liste ratisse large, elle additionne tous les suffrages
du premier tour et obtient 43,7 % des voix, 26 sièges
et la Mairie. A nouveau, Saumur se singularise, alors qu'à
l'échelle nationale, ces élections ont été
catastrophiques pour la gauche.
Les esprits chagrins pourront toujours minorer ce succès ; après tout, les 5 304 suffrages de la liste Marchand ne représentent que 27,18 % des électeurs inscrits. Saumur apparaît bien comme une ville désemparée.
8) L'alternance à la mairie ( 29 septembre 2017 )
Revenu aux affaires,
Jean-Michel
Marchand fait preuve de dynamisme et d'opiniâtreté,
quoi qu'en disent ses adversaires. Il pousse les travaux du Plan
de Rénovation Urbaine, en remodelant le quartier du Chemin
Vert et en remplaçant par la nouvelle avenue François
Mitterrand l'ancien quartier de la Manivelle, de sinistre mémoire.
Il termine la nouvelle école du Clos Coutard, il unifie
les deux écoles de Bagneux et prépare le regroupement
de l'école Chanzy avec l'école de Maremaillette.
Il se dit très fier de son pôle universitaire. Il
achève la piétonnisation de la rue Saint-Nicolas
et réalise celle de la place Saint-Pierre. Malgré
la charge écrasante de son patrimoine, la ville parvient
à comprimer sa dette et à écarter les dangers
des emprunts structurés. Jean-Michel Marchand regrette
de n'avoir pas pu inverser la courbe de la population. C'était
impossible, et nous démontrons ailleurs qu'en raison des
lois impitoyables de la démographie, l'agglomération
tombera au-dessous des 25 000 habitants vers 2030.
Fort de son expérience et des liens tissés au cours
des années, Jean-Michel Marchand est élu président
de la nouvelle Communauté
d'agglomération Saumur Val de Loire, le 13 janvier 2017.
Demeurer en même temps maire de la ville de Saumur n'est
nullement interdit par la loi ; cette situation serait conforme
à une longue tradition remontant au district urbain de
1965 et elle favoriserait la cohésion d'une jeune communauté
qui se cherche. C'est d'ailleurs l'avis de Jean-Michel Marchand :
« je continue de penser qu'il est plutôt bien
quand on est maire de la ville-centre d'être aussi président
de l'agglo » ( le Courrier de l'Ouest,
27 septembre 2017 ). Cependant, les élus sont impopulaires
et ont tout fait pour le devenir. Tout soupçon de cumul
est désormais honni, même au-delà de la logique
opérationnelle.
Au nom d'un accord passé avec Jackie Goulet lors
de la fusion des deux listes concurrentes en 2014, J.-M. Marchand
choisit l'agglo et renonce à la mairie. Cet accord, passé
entre deux listes de force égale, a une certaine logique
et les électeurs, qui s'en doutaient, ont approuvé
cette fusion par un parfait report des voix. A droite, selon J.-M.
Marchand, a passé le même accord « avec
Charles-Henri Jamin en 2008. Sauf que vous ne l'avez pas tenu.
Je le sais. Vos amis étaient venus me voir pour me demander
de me présenter pour empêcher l'accord de se mettre
en place » ( Saumur-kiosque, 30 septembre
2017 ). Au demeurant, ce n'est pas le maire qui est choisi
par le verdict des urnes, mais la liste, qui a ensuite le libre
choix du premier magistrat. En
l'affaire, il n'y a pas de changement de politique ni de
majorité ;
un retour devant les électeurs ne s'imposait nullement.
Jackie Goulet, né
dans le Noyantais, à Auverse, le 20 septembre 1962 ( depuis
1945, trois maires seulement sont nés à Saumur ),
est un autodidacte qui n'a pas oublié ses origines modestes
et est classé comme centre-gauche. Il a déployé
une activité débordante à la tête de
la commune de Turquant et dans ses fonctions de conseiller général
de Saumur-Sud, ainsi que dans l'animation de la ville en qualité
de premier adjoint. Son élection à la mairie de
Saumur était logique, mais elle s'est déroulée
dans un climat pesant. Il n'obtient que 19 voix, alors que la
majorité compte 26 élus ; 6 suffrages se sont
portés sur le nom de Jean-Michel Marchand, exprimant ainsi
un désaccord envers le changement de maire. La rivalité
très nerveuse entre les deux listes en 2014 et certains
écarts de langage ont laissé des marques profondes.
Dans les faits, la réunification des deux listes n'est
pas complète ; les maires délégués
et les autorités préfectorales ont exprimé
des réticences ; 19 voix, cela fait une courte majorité.
Un autre changement est à noter ; la promotion
de Jean-Luc Lhémanne, un revenant, au poste de premier
adjoint. Sans qu'on puisse parler de raz-de-marée comme
aux scrutins nationaux, la ville est elle-aussi secouée
par des lames de fond.
9) Le premier tour
des municipales de mars 2020, la consécration de Jacky Goulet
[ rédigé le 19 mars 2020 ]
La crise des "Gilets jaunes" a fortement secoué le Saumurois, sans déboucher sur des mouvements structurés. L'opposition à la réforme du régime des retraites a engendré une masse de manifestations sans précédent. Ainsi, les réformes menées à la hussarde par un gouvernement brutal aboutissent à un mécontentement profond. De nature différente, la crise sanitaire du coronavirus vient renforcer le trouble des esprits et elle explique le taux des abstentions à 62,08 %, alors qu'il avait déjà atteint à 37,8 % au premier tour des municipales de 2014. Cette abstention anormalement élevée incite à s'en tenir à des commentaires très généraux.
Une campagne civilisée
Peu de polémiques violentes ; peu de nouveaux venus entrant dans l'arène politique ; réapparition en tête des listes de figures déjà connues ; une seule liste ouvertement liée à un parti, celle du Rassemblement national ; les autres se disent " citoyennes " ( encore heureux ! ). Tout de même, réunir six équipes, pas trop bricolées de 35 candidats, selon des normes difficiles, est déjà un tour de force. Peu d'idées nouvelles, à part la volonté de compenser le lamentable fiasco du Dôme laissé par le District et en oubliant un peu que reprendre les affaires de la culture est fortement coûteux.
La consécration de Jacky Goulet
Ayant échoué à
deux voix et placé à la mairie par suite d'un accord direct avec
Jean-Michel
Marchand, Jacky Goulet, dynamique retraité de la Centrale d'Avoine,
n'avait pas l'onction du suffrage universel. Il
a compensé ce handicap par une présence permanente et sympathique sur
le
terrain, par une avalanche d'idées originales parfois provocantes,
comme la transformation de la chapelle Saint-Jean en boîte de
nuit, ou brouillonnes, comme le serpent de mer du casino, par la
multiplication des manifestations festives, qui donnent
l'impression d'un réveil de la ville.
Avec une incontestable habileté, il lance sa campagne sans hâte
et parvient à rallier sous sa bannière des personnalités de droite et
de gauche, en excluant les plus prononcées. Les marcheurs macronistes
n'ayant pû dégager de leader incontesté, il se concilie la REM sans
vraiment s'engager. En même temps, il reprend quelques représentants
d'un P.S. devenu moribond par ses guerres claniques ; il reconduit la
représentante des radicaux ; il débauche un cadre des Verts
et une ancienne élue communiste ; il proclame aussi son
attachement à la C.G.T. Pour les services administratifs, sa
liste, trop peu renouvelée, se classe au Centre-Gauche. Pour ses
opposants, cinq listes sur six, il s'agit de pur
opportunisme. Mais ces dernières sont loin d'avoir son
habileté.