La domination des villes sur les territoires ruraux est devenue un fait généralisé, qu'on s'en réjouisse ou non. Le « rural profond » a disparu de la typologie de l'INSEE et les derniers programmes de géographie pour les classes de Première présentent la France comme « un territoire sous l’influence urbaine ». En tout cas, dans le Saumurois, quelques pôles urbains structurent une périphérie où plus de 40 % des actifs viennent travailler dans une agglomération voisine. Ces faits ne résultent nullement d'un plan concerté : qualifier d'impérialiste l'attitude des dirigeants locaux serait un contresens. Tout au contraire, ces derniers laissent les esprits mûrir, ils manquent plutôt d'ambition et de dynamisme, ils se montrent très conciliants dans le dosage des postes de responsabilité, au point que la ville centrale est constamment minoritaire dans les organismes intercommunaux. Les remodelages administratifs, qui s'accélèrent aujourd'hui, ont toujours été impulsés par les autorités supérieures, par l'intermédiaire du préfet et du sous-préfet.
1) Une impulsion venue d'en haut
Les technocrates du régime
de Vichy sont habituellement aux origines de nos
restructurations ;
ils ont inventé les Pays de la Loire, avec Angers pour
capitale ; ils souhaitaient ouvertement unifier l'agglomération
de Saumur et ils en réalisent les premières étapes.
En mai 1941, quand ils fixent le périmètre des plans
de reconstruction de la ville, ils y englobent
Saint-Lambert-des-Levées,
qui est effectivement touché par les bombardements, mais
aussi Bagneux et Saint-Hilaire-Saint-Florent, qui ne comprennent
pas cette décision ( A.D.M.L., 97 W 78 ).
Quand la police nationale est mise en place, à Saumur
en janvier 1943, la zone de police de la ville couvre toute
l'agglomération,
que parcourent ses patrouilles. Pour ce service, les communes
de Bagneux, Saint-Hilaire-Saint-Florent et Saint-Lambert-des-Levées
doivent verser une contribution de 3 F par habitant ; en
contrepartie, ces communes espèrent l'ouverture d'un poste
de police, qu'elles n'obtiennent pas.
Par la suite, c'est toujours du haut que sont venues les
incitations à la coopération intercommunale ou à
l'unification, soit par des lois accompagnées de primes
alléchantes, soit par des conseils pressants de hauts fonctionnaires.
Sans administration spécifique,
les anciens cantons ne jouaient qu'un rôle politique, fort
apprécié par les notabilités locales, mais
plutôt boudé par la majorité des électeurs.
Le canton de Saumur-Sud, regroupant le plus gros des habitants
de la ville, était habituellement considéré
comme un fief obligé du maire de la cité.
Au nord, la situation était plus fluctuante. Par
un décret du 30 mai 1963 signé Georges Pompidou,
l'ancien canton de Saumur Nord-Est devient le canton d'Allonnes,
mais le quartier de la Croix Verte passe dans le canton de Saumur
Nord-Ouest, qui devient Saumur Nord ( A.M.S.,
6 D 1 ).
Cette nouvelle circonscription semblait destinée à
se renforcer, car la municipalité de Villebernier, en 1965,
demande à quitter le canton d'Allonnes pour la rejoindre,
mais sans succès. Cette zone demeure instable. Les trois
communes des Rosiers, de Saint-Clément-des-Levées
et de Saint-Martin-de-la-Place n'entrent pas en 2001 dans la communauté
de Saumur Loire Développement, mais rejoignent la communauté
de communes de Loire-Longué en 2003, puis continuent à
hésiter. Le canton de Saumur Nord est donc éclaté.
Ces nouvelles orientations sont consolidées par le nouveau
découpage cantonal de 2014 : le nouveau canton de
Saumur réunit l'ancien canton de Saumur Sud et la partie
nord de la ville, gagnant ainsi en cohérence, alors que
les trois communes précédentes rejoignent le canton
de Longué-Jumelles. La partition de la rive droite de la
Loire est encore renforcée. Mais on peut s'interroger sur
l'importance et l'avenir de ces nouveaux cantons.
3) Le district urbain de Saumur ( 1965-2000)
Les pressions du préfet
et du sous-préfet en faveur de l'intercommunalité
aboutissent à une première étape le 26 juillet
1965, quand le préfet René Jannin, venu à
Saumur pour le carrousel, signe l'acte de naissance du District
urbain. Cette création ne fait pas grand bruit, bien qu'elle
constitue une première dans le Maine-et-Loire.
Les négociations, plutôt longues, sont détaillées
dans des notes du sous-préfet ( A.D.M.L.,
396 W 17 ).
La commune de Saint-Hilaire-Saint-Florent a donné facilement
son accord, alors que les maires de Bagneux et de Saint-Lambert
se montrent plus réticents. Après plusieurs réunions
techniques, les divers conseils municipaux donnent leur adhésion
du 29 juin au 15 juillet. Les élus des petites communes
se sont déclarés inquiets devant la hausse prévisible
des impôts locaux. Afin de les rassurer, les contributions
au fonctionnement du district seront calculées comme suit :
50 % au prorata de la population de chacune des communes,
50 % au prorata
de la valeur de chaque centime communal. C'est donc la ville de
Saumur qui prendra le plus gros des charges.
Cependant, cette association ne fait que préfigurer une prochaine fusion, selon l'avis du sous-préfet dans la Nouvelle République du 8 novembre 1965.
L'expansion géographique
du district est opérée par petites étapes.
Au départ, il ne regroupe que les communes de Saumur, Bagneux,
Saint-Hilaire-Saint-Florent et Saint-Lambert-des-Levées.
Mais dès sa création, les communes de Dampierre-sur-Loire
et de Chacé se déclarent susceptibles d'y entrer
dans une seconde phase. De fait, en 1968, donnent leur adhésion
Chacé et Varrains, exclusivement dans les domaines de l'eau,
de l'assainissement et des zones industrielles. En 1973, lors
de la fusion, le district se trouve renforcé par Dampierre
et il doit alors remodeler ses structures, car il ne compte désormais
plus que trois communes.
L'ouverture de la partie sud de la rocade et l'aménagement
de la vaste zone d'aménagement concerté du Champ
Blanchard entraînent de longues négociations avec
la commune de Distré. Tous admettent que seul le District
a les moyens pour mettre en valeur ce vaste ensemble de terrains,
mais un fort groupe d'habitants préférerait la création
d'un syndicat intercommunal à vocation unique, réunissant
la commune et le district, ce qui pourrait laisser à Distré
plus de 20 % des taxes professionnelles attendues. Finalement,
le 28 octobre 1993, le Conseil municipal de Distré accepte
d'entrer dans le district de Saumur par 11 « oui »
et 4 « non ». Les conseils municipaux des trois
autres communes ratifient cette adhésion avec une parfaite
unanimité.
Le district étend donc son aire géographique à
cause des zones industrielles communes, qui constituent sa principale
raison d'exister, cela malgré un contretemps : la
création d'une zone industrielle le long de la voie ferrée
à Saint-Lambert-des-Levées est interdite, car elle
est située en zone inondable. L'autre domaine de compétence
est la gestion de l'eau, lourd dossier qui a engendré bien
des débats. La régie municipale est abandonnée
en 1990 en faveur d'une concession à une société
privée, en l'occurrence la S.A.U.R., dont le contrat durera
jusqu'à la fin de 2020. Les partisans de ce choix invoquaient
la compétence technique de cette société
et les lourds investissements, qui étaient nécessaires
et qui ont été opérés ; en même
temps, les intérêts de l'ancien personnel municipal
étaient garantis. Les opposants constatent seulement que
le prix du mètre cube a flambé. L'assainissement
et les stations de traitement des eaux usées viennent tout
naturellement en complément de ce service. Le troisième
champ de compétence du District est la gestion du Centre
de Secours et d'Incendie, qui reçoit de nouveaux locaux
construits sur le boulevard Delessert et qui est complété
par le SMUR ( Service mobile d'urgence et de réanimation ).
Le service d'enlèvement des ordures ménagères
est ajouté en 1967. Après un tassement de son champ
de compétence, le District élargit ses horizons
à partir de 1994 ; il se met à préparer un
Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme et
lance un Programme local de l'Habitat.
Le District s'est donc développé par petites
étapes en fonction des besoins évidents des communes
associées ( les esprits ont eu le temps de mûrir ).
Il n'a pas engendré une énorme administration ;
longtemps, il est alimenté par les contributions des collectivités
participantes, contributions que les élus de Bagneux et
de Saint-Lambert trouvent trop lourdes, ce qui provoque une démission.
En même temps, les tendances expansionnistes de ce type
d'organisme sont évidentes. A partir de 1974, il lève
ses propres taxes. Les petites communes, ne disposant pas de services
techniques, ont le sentiment d'être dominées par
la commune centrale.
Les structures ont varié, mais le maire de Saumur
exerce en permanence la fonction de président ( même
quand il n'est pas candidat au premier tour du scrutin ).
Ses fonctionnaires font tourner la machine ; la lettre trimestrielle
du District reprend la charte typographique de la ville et le
style de ses communicants. Bien sûr, les maires des communes
associées reçoivent des postes de vice-président
; au départ, les représentants de Saumur, élus
ou non, détiennent seulement la moitié des postes
au Conseil de District ( 12 sur 24, 4 pour chacune des autres
communes, l'opposition municipale n'obtenant que quelques
strapontins ).
Malgré tout, l'impérialisme candide de l'ancien
centre ville peut expliquer les fortes réticences devant
les nouveaux rapprochements intercommunaux. Le District, qui apparaît
plutôt comme une réussite, se trouve dépassé
par les normes exigées pour les nouvelles communautés
d'agglomération. Il tient son dernier conseil le 8 décembre
2000.
4) La fusion-association : Ville de Saumur ( 1973 )
La formule du district
paraissait couvrir largement les faibles besoins d'intercommunalité
des habitants de l'agglomération ; aucune voix ne s'élevait
localement pour réclamer un renforcement des liens. L'initiative
est encore venue d'en haut, plus précisément de
la loi du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de
communes.
Ne commettons pas d'anachronisme : les lois Defferre sur
la décentralisation ne sont venues qu'en 1982-1983. Le
préfet pouvait fort bien d'un trait de plume modifier des
limites communales. Mais le pouvoir central, alors tout puissant,
préfère y mettre des formes, au moins dans un premier
temps et il apporte dans la corbeille de mariage la promesse d'une
majoration allant jusqu'à 50 % des subventions de
l'Etat pour les travaux d'équipement pendant une période
de cinq ans.
Le 3 septembre 1972, le préfet relève dans l'est
de son département trois ensembles se prêtant à
une fusion : Chênehutte et Trèves-Cunault, Longué
et Jumelles, ainsi que Saumur, Bagneux, Saint-Hilaire-Saint-Florent
et Saint-Lambert- des-Levées ( A.D.M.L.,
396 W 17 ).
A ce stade, Dampierre n'est pas évoqué. Le sous-préfet,
André-François Bouquin, a pour mission de réaliser
ces fusions sans délai ; dans ses rapports, il détaille
les nombreuses démarches qu'il doit opérer ( A.D.M.L.,
396 W 3 ).
Deux options étaient possibles : la fusion simple,
qui réunifie purement et totalement plusieurs entités
; la fusion par association ( la commune de Saumur écrit
constamment « fusion-association » ),
qui ménage davantage le patriotisme de chaque commune,
en maintenant obligatoirement les anciennes mairies, leur dénomination
et leur état-civil, en instituant des maires-délégués,
ainsi que des commissions consultatives, et en accordant des quotas
généreux de conseillers-délégués.
Cette dernière formule est jugée préférable
à Saumur, car elle ménage mieux les intérêts
des quartiers et les plans de carrière d'élus nouvellement
installés.
Dès juillet 1972,
le conseil municipal de Dampierre-sur-Loire se prononce en faveur
de la fusion ( la structure socio-professionnelle du village
ne l'imposait pas ; des relations entre les maires expliquent
cette démarche ). Dans la commune de Saumur, le Conseil
municipal approuve le projet le 19 janvier 1973, à l'unanimité
des 25 votants. Sans esprit impérialiste, mais avec un
certain enthousiasme, car on venait de prendre connaissance des
projets de la Délégation à l'Aménagement
du Territoire et à l'Action Régionale ( DATAR ),
qui renonçait à favoriser les grandes métropoles
pour relancer les villes moyennes de 20 000 à 100 000
habitants. Saumur, passant de 22 000 à 33 000
habitants, se trouverait mieux placée pour profiter des
aides promises et voyait l'avenir en grand. L'acceptation du Conseil
municipal de Saint-Lambert-des-Levées se déroule
sans anicroche. A Bagneux, le Conseil approuve le projet par 14
pour et 6 contre, sous l'expresse réserve de l'adhésion
des autres communes consultées. Saint-Hilaire-Saint-Florent,
qui avait facilement accepté le district, se montre plus
autonomiste ( nous avions déjà noté
son particularisme au XIXe siècle,
tant sur le plan politique que religieux ). Ce particularisme
de clocher apporte une première explication à cette
résistance. Les motivations financières tiennent
aussi une place importante ; les municipalités des
communes périphériques avaient pratiqué une
gestion de commune rurale, peu portée sur les investissements
et sur les emprunts ; aussi avaient-elles pu maintenir un
bas niveau d'imposition. Il est prévu que « l'intégration
fiscale » sera progressive et s'étalera sur
six années. Cependant, personne ne se berçait d'illusions :
les impôts locaux allaient flamber et les nouveaux venus
seraient désormais soumis à une fiscalité
de ville, généreuse en investissements lourds et
en dépenses de prestige. Pour ces motifs, le Conseil municipal
de Saint-Hilaire-Saint-Florent vote contre la fusion le 19 janvier
1973 par 14 voix contre et 6 pour, en sous-entendant tout de même
qu'il pourrait revoir sa position dans deux ans. Comme il en a
le droit, le préfet exige une réunion extraordinaire
du conseil, sous la menace implicite que les réfractaires
seraient traités comme des pestiférés. Le
maire se rallie dans une proclamation confuse et, le 29 janvier
1973, les élus s'inclinent par 12 voix pour et 7 contre
( Michel Pagé, Recueil et recherches sur
Saint-Hilaire-Saint-Florent
d'hier, p. 186 -191 ).
La fusion s'est donc opérée dans la douleur,
faute de sentiment communautaire, peut-être aussi parce
que la formule du district paraissait suffisante. Des oppositions
continuent à se manifester. L'association " la
Sauvegarde ", fondée en octobre 1988, réunit
un nombre significatif de Bagneulais et de Florentais ; en 1991
encore, elle organise un sondage en faveur de la
« défusion »,
en présentant la perspective d'un référendum...
Plusieurs décennies plus tard, ces combats nous paraissent
avoir été d'arrière-garde. La fusion s'est
opérée dans les faits et dans les esprits ; à
l'exception de sociétés de jeu de boules, toutes
les associations sont structurées au niveau de la nouvelle
commune. Les entrants paient de plus lourdes taxes, mais ils ont
tiré de substantiels profits du renforcement de l'agglomération.
Saint-Lambert a pu mettre en place une vaste zone d'activités,
Bagneux d'immenses lotissements, Saint-Hilaire-Saint-Florent un
nouveau centre, le percement de la rue de l'Abbaye et la construction
de l'ENE. Auraient-ils opéré ces réalisations,
s'ils étaient restés seuls ? Dampierre n'est
pas perdant non plus, ses foyers disposent du plus haut revenu
de l'agglomération. En ce qui regarde
la démographie - un excellent baromètre -
nous avons noté l'ascension des communes périphériques,
qui deviennent majoritaires, alors que l'ancien centre décline.
La nouvelle commune prend le nom de " Ville de Saumur ". Je me permets de souligner cette dénomination, la seule officielle. Elle est bien appliquée sur les pancartes marquant l'entrée de l'agglomération, mais pas toujours sur les papiers et les publications de la mairie, ni dans les statistiques de l'INSEE. Il s'agissait pourtant de bien souligner qu'il s'agissait de la création d'une nouvelle commune et non de l'agrandissement de l'ancienne.
Le nouveau Conseil municipal est formé par les 27 élus du centre, par 5 élus de Bagneux, 5 de Saint-Hilaire-Saint-Florent, 5 de Saint-Lambert-des-Levées et un élu de Dampierre. Quatre maires délégués sont élus et assistés par des commissions consultatives. C'est une lourde machine qui se met en place, bien plus lourde qu'en cas de fusion simple. Les élus avaient été choisis en mars 1971. Il fallait bien les laisser se prélasser un peu dans leur fauteuil.
La
nouvelle commune n'a nul besoin de se doter d'une nouvelle
administration ;
le personnel et les locaux fusionnent tout simplement. Cependant,
les communicants expliquent que la ville a besoin d'une identité
visuelle, reposant sur un logo et une charte graphique. Jean-Paul
Hugot a d'abord adopté, au prix fort, " Saumur
une signature ", qu'on voit ici décliné
en pin's. Ensuite un nouveau logo a déjà connu trois
moutures, qu'on voit à droite, dans un montage réalisé
par Saumur-Kiosque. Les puristes de la typographie remarqueront
qu'on y mélange des caractères sérif et sans-sérif.
La version la plus récente présente l'avantage de
n'avoir rien coûté, de rétablir le nom officiel
de " Ville de Saumur " et de colorier en bleu
l'envahissant serpent qui est censé évoquer la Loire.
Le fonctionnement de la ville de Saumur trouve un nouvel équilibre à partir des élections de 1977, où le nombre des élus est réduit de 39 à 31. Cependant, le choix de la municipalité est perturbé en 2001, du fait que la cité est tombée au-dessous des 30 000 habitants et que, le sectionnement étant rétabli, le maire est choisi par le seul Saumur Centre. Cette anomalie est corrigée en 2014. Voir l'Historique des municipalités. L'action des élus est détaillée dans les diverses sections de ce chapitre.
A la
même époque, un changement d'importance se produit à l'échelon national
: le passage à l'Euro le 1er janvier 2002. Afin de familiariser les
habitants avec la nouvelle monnaie, beaucoup de villes ou d'organismes
publics émettent des euros temporaires, qui s'échangent au cours légal
de 6,50 F. Cependant, leur durée de circulation est limitée, en général
un mois et encore un peu moins à Saumur.
En 1998, la CCI fait frapper 19 000 exemplaires de pièces blanches d'un euro et 11 000 exemplaires de pièces jaunes de deux euros, d'un assez fort diamètre de 33 mm. En voici un exemplaire frappé par Pichard-Balme : ![]() |
5) L'agglomération Saumur Loire Développement ( 2001 )
Nous avons quitté
le District le 8 décembre 2000, alors qu'il tient son dernier
conseil. Ce modèle d'organisme est condamné par
la loi Chevènement du 12 juillet 1999, qui prévoit
de nouveaux types d'Etablissements Publics de Coopération
Intercommunale :
- à la base, les simples communautés de communes ;
elles se mettent en place autour de Montreuil-Bellay et d'Allonnes
; tel serait également le destin du District s'il ne s'agrandissait
pas ;
- plus prestigieuses, les communautés d'agglomération
doivent rassembler plus de 50 000 habitants d'un seul tenant
autour d'un centre urbain de plus de 15 000. Afin d'encourager
la conclusion de ces ententes, le gouvernement promet une dotation
de 250 F par habitant et l'accès à des fonds européens.
En décembre 1999, le préfet fixe par arrêté
les limites de la nouvelle communauté d'agglomération :
elle englobera le canton d'Allonnes, la Ville de Saumur, le reste
du canton de Saumur Sud et le canton de Montreuil-Bellay. Le
sous-préfet,
Dominique Fétrot, s'emploie à convaincre les élus
des communes concernées. En général avec
succès, mais à l'extrémité sud, les
conseils municipaux d'Epieds et d'Antoigné se sont prononcés
contre l'adhésion. Le préfet les englobe quand même,
car ils ne confirment pas leur vote au cours des trois mois suivants
et car leurs maires se sont ralliés. L'opération
a été menée tambour battant, sans grande
réflexion, sans débat, sans définition d'objectifs.
Les autorités supérieures sont pressées de
conclure, parce que les élections municipales de mars 2001
approchaient et qu'avec de nouveaux élus, il faudrait dans
doute remettre l'ouvrage sur le métier. Le maire de la
Ville de Saumur, Jean-Paul Hugot, se montre également très
favorable à cette création et il minimise le changement
quand il déclare : « La Communauté
d'agglomération n'est jamais qu'une transformation du district
urbain de Saumur. » Cette transformation, il la fait
approuver par le Conseil municipal du 6 avril 2000, malgré
les réticences de l'opposition, qui « a le sentiment
qu'on va trop vite » ( la Nouvelle République,
7 avril 2000 ).
En tout cas, le nouvel
établissement public naît le 1er janvier 2001, fort
de 32 communes et d'environ 61 500 habitants. Sa dénomination
officielle devient " Communauté d'agglomération
de Saumur Loire Développement ". Ce titre, apparu
en décembre précédent et sans paternité
revendiquée, n'est ni pratique ni mobilisateur. Dans l'usage
courant, on s'est mis à l'appeler " l'Agglo ",
puis " Saumur agglo " à partir de septembre
2010, ce qui sonne mieux, mais qui témoigne d'une instabilité
fâcheuse et d'un manque de rigueur dans le vocabulaire.
En effet, selon les strictes définitions de l'INSEE, l'agglomération
de Saumur se réduit à la ville, à Souzay-Champigny
et à Turquant. Un habitant de la Breille-les-Pins ou d'Antoigné
appartient à la communauté, mais pas à l'agglomération.
En outre, les services supérieurs de l'Etat ne connaissent
que " Saumur Loire Développement ".
Tout pour embrouiller le citoyen de base. Bien entendu, la nouvelle
communauté se dote d'un logo.
Comme son nom le suggérait, l'Agglo devait centrer
son action sur le développement économique et l'aménagement
de l'espace communautaire ( zones d'aménagement concerté,
transports, parkings ). Les textes fondateurs lui faisaient
aussi l'obligation d'établir un programme d'habitat social
et de mettre en place des dispositifs d'insertion. En outre, dans
la foulée du District et en raison de liens antérieurs,
la communauté a étendu son champ d'action sur des
compétences facultatives, sur l'eau, sur l'assainissement,
sur la protection de l'environnement, sur l'élimination
et la valorisation des déchets, sur la construction et
la gestion d'équipements sportifs et culturels d'intérêt
communautaire. Toute organisation ayant une tendance naturelle
à élargir son domaine, elle gère tout le
réseau des bibliothèques, elle restaure à
grand frais le théâtre et veut y implanter un pôle
culturel, elle renfloue la société gestionnaire
du parc du Breil, elle reprend en partie Anjou-Vélo-Vintage,
elle affiche des ambitions universitaires et elle souhaite s'installer
dans un siège réunifié. Les conséquences
de ces nouvelles ambitions sont l'apparition d'une fiscalité
complémentaire et la multiplication d'énormes documents
d'études, toujours brillamment présentés,
truffés de mots savants, sans doute pour impressionner
les maires de la campagne, rédigés dans un curieux
mélange de langue de bois et de jargon technocratique.
Essayez donc de lire le Plan Climat Energie Territorial
( PCET )
ou le Schéma d'Aménagement et de Gestion des Eaux
consacré au Thouet...
Cette pluralité
des tâches et l'accord sur un quota de postes par canton
transforme la communauté en une lourde machine. Le 8 janvier
2001 se réunit le Conseil composé de 93 membres,
31 délégués de la Ville de Saumur et deux
délégués pour chacune des 31 autres communes.
Le Conseil élit le président et 17 vice-présidents,
responsables de 4 commissions stratégiques et de 13 commissions
opérationnelles, le tout composant un bureau de 18 membres.
Sur quoi vient se surajouter un Collège des maires. Au
moment de quitter Saumur, le sous-préfet Fétrot
n'est pas très fier de la fille qu'il a engendrée :
« Se pose la question de son efficacité et de
sa lisibilité. Le citoyen lambda sait-il à quoi
elle sert ? C'est une structure lourde où l'on discute
beaucoup ; ça fait un peu usine à gaz... L'agglo,
c'est un gros porteur qui a du mal à prendre son envol ! »
( Nouvelle République, 7 novembre 2002 ). Même
si les structures se sont un peu allégées ( nous
ne pouvons pas entrer dans le détail des bricolages institutionnels
qui ont entraîné une crise en janvier 2015 ),
les critiques fusent de partout et un autre problème a
surgi.
Afin d'amadouer les élus des petites communes qu'on
dit rurales, alors qu'elles ne le sont plus, la Ville de Saumur
n'avait demandé pour elle que le tiers des sièges
au Conseil communautaire ( 31 sur 93 ) et 5 postes de
vice-président ( étant sous-entendu qu'avec
la présidence, cela ferait 6 sur 18 ), étrange répartition,
alors que la ville représentait à peu près
la moitié de la population. En réalité, la
communauté s'était mise en place sous l'égide
de la ville de Saumur, qui leur procurait son premier siège,
un immeuble sur le quai Carnot et 51 postes d'agents détachés
( Courrier de l'Ouest, 20-XII-2006 ). Comme au
temps du District, la présidence semblait revenir tout
naturellement au maire de la ville principale. De fait, Jean-Paul
Hugot est élu le 8 janvier 2001 par 68 voix contre 22 au
maire de Montreuil. Il faut tout refaire le 19 avril, après
les municipales. J.-P. Hugot, qui vient de perdre la mairie de
Saumur, n'obtient que 35 voix ; son successeur, Jean-Michel
Marchand, est porté à la présidence par 56
suffrages. Il ne s'agit sûrement pas d'un vote politique,
mais d'un vote de légitimité en faveur du maire
en place. Même scénario en sens inverse le 17 avril
2008 : Michel Apchin, le nouveau maire, est élu par
62 voix contre 30 à Jean-Michel Marchand.
Ce dernier est redevenu le premier magistrat de la cité
lors du renouvellement de l'Agglo le 25 avril 2014, dans un dispositif
un peu allégé ; il obtient 32 suffrages, alors
que le maire de Neuillé est élu avec 39 suffrages.
Ce vote n'est pas essentiellement politique, comme le montre la
suite du scrutin ; c'est une fronde des élus des petites
communes contre la ville principale, contre ses joutes politiciennes,
contre une forme d'arrogance de ses responsables, édiles
ou fonctionnaires. Personne n'a intérêt à
réveiller des rivalités ville-campagne, alors que
le but de la communauté est de renforcer leur complémentarité.
Le fonctionnement de l'agglomération et celui de la Ville
de Saumur sont étroitement liés ; elles partagent,
à temps partiel, des fonctionnaires et l'informatique.
Un conflit serait dévastateur ; ce risque semble avoir
été désamorcé en 2017 .
Sans doute n'a-t-on pas assez réfléchi lors de la création de ce nouvel organisme, qui prend de plus en plus d'importance ; sans doute n'a-t-on pas assez clairement défini son champ d'action. En un temps où l'on condamne de plus en plus vigoureusement le cumul des mandats, la plupart de ses responsables exercent d'autres fonctions. Leur mode de désignation est contestable ; adopter des critères géographiques gêne la formation d'équipes et la formulation d'objectifs. Il pèsera toujours un soupçon de petits arrangements de couloir tant que les dirigeants n'auront pas reçu l'onction du suffrage universel direct.
6) La difficile naissance du Grand Saumurois ( 2014 )
La loi Voynet du 25 juin
1999, en complément d'une précédente loi
Pasqua, créait une nouvelle entité territoriale,
le Pays, mesure encouragée par la promesse de subventions
spécifiques pour réaliser les projets de la nouvelle
circonscription. Saumur se met alors à rêver d'un
" Grand Saumurois " correspondant à
l'arrondissement et englobant tout l'est du département,
y compris le Baugeois et le Vihiersois. C'est le projet que lance
l'association " Saumur et sa région "
( Nouvelle République, 20 novembre 1999 ).
Il faut vite déchanter devant la volonté d'autonomie
du Pays baugeois et des cantons situés au nord de la Loire,
ainsi que du Vihiersois, qui préfère en permanence
s'associer à des secteurs ruraux des Mauges. Il convient
de le constater avec franchise : la Ville de Saumur n'a pas
assez de poids et de dynamisme pour s'imposer sur une vaste
circonscription.
Le Conseil général étudie alors un découpage
prévoyant, outre une circonscription autour de Saumur,
un Pays baugeois, un Pays Loire-Authion et un Pays Layon Lys Aubance,
soit au moins quatre pays dans l'ancien arrondissement. En décembre
2000, c'est le SMISS, le Syndicat intercommunal du Sud-Saumurois,
présidé par Jean Bégault, qui est chargé
des études préalables. En mai 2002, la Communauté
d'agglomération Saumur Loire Développement, la Communauté
de communes de la région de Doué et la Communauté
de communes de Gennes se mettent d'accord pour créer un
Conseil de Développement du Pays saumurois. Une structure
nouvelle est en gestation ; comme l'avait fait Jean-Paul Hugot,
Jean-Michel Marchand presse un peu la cadence. Le futur Syndicat
mixte du Pays saumurois devrait être dirigé par 33
représentants de Saumur Loire Développement, 12
représentants du Douessin et 11 du Gennois, soit le nombre
de communes de chaque entité augmenté d'une unité ;
cette répartition donnerait la moitié des voix à
l'Agglo de Saumur, qui représente quand même les
3/4 de la population, qui, en cette affaire, ne fait pas preuve
d'un impérialisme voyant et qui a jusqu'alors payé
les 2/3 des frais de fonctionnement. En juillet 2003, cette
répartition,
jugée trop favorable à Saumur Loire Développement
( qualifiée à tort d'être majoritaire ),
est rejetée par le représentant du Gennois, qui
affirme parler au nom des dix maires de sa communauté et
qui veut maintenir des liens avec le Pays Layon Lys Aubance. Résurgence
d'un vieux conflit ville-campagne ? Manoeuvres de notables
locaux ? En tout cas, le projet est coulé et de précieuses
subventions, tant françaises qu'européennes, sont
perdues.
Le Grand Saumurois commence donc petit. Il naît par
un arrêté du sous-préfet du 16 septembre 2004,
qui crée le Pays saumurois, ne comprenant que les 43 communes
de Saumur Loire Développement et de la région de
Doué et installant son siège à Montfort,
à mi-chemin entre ses deux capitales. Doté d'un
budget d'un million d'euros, il peut accorder des prêts
pour la création d'entreprises et la valorisation du patrimoine.
En même temps, les notables des communautés
de communes voisines s'interrogent sur leur devenir, sans pour
autant associer leurs concitoyens, qui s'intéressent peu
à ces emboîtages de structures. La Communauté
de communes de Gennes fait un tour de valse avec le " Pays
de Loire en Layon ", pour ensuite revenir dans le giron
du Pays saumurois. Plus spectaculaire encore, la Communauté
de communes Loire Longué, qui n'avait fait aucun pas vers
le sud, adhère au Pays des Vallées d'Anjou, puis
elle l'abandonne à compter de la fin de 2013 pour se retourner
vers Saumur. Le périmètre de fusion du Pays saumurois
est enfin constitué avec une incontestable cohérence,
si toutefois les fils prodigues restent fidèles à
leur nouveau choix. Pour la Ville de Saumur, des liens avec
Chênehutte-Trèves-Cunault
et Saint-Martin de-la-Place permettent une meilleure continuité
territoriale. Le nouveau pays constituera une unité de
107 000 habitants et de 64 communes.
En parallèle, à partir de septembre 1997, un autre syndicat mixte doit élaborer le Schéma directeur du Saumurois, document d'organisation spatiale, rebaptisé Schéma de cohérence territoriale ( SCoT ) depuis la loi SRU du 13 décembre 2000 relative à la Solidarité et au Renouvellement urbains. Alors que les SCoT du Choletais et du Pays Loire Angers sont approuvés, l'élaboration du document saumurois prend du retard pour l'évidente raison que ses frontières sont mouvantes ; après une période de consultations, il est enfin déposé le 27 décembre 2013, sous la forme d'une énorme compilation, rédigée dans la novlangue administrative et juxtaposant les plans du Sud-Saumurois et du Longuéen.
L'évolution semble
donc favorable : à compter du 1er janvier 2014, le
Pays saumurois et le syndicat mixte chargé du SCoT se réunifient
pour donner naissance au syndicat mixte du Grand Saumurois. Les
intérêts des nouveaux arrivants sont fortement protégés ;
le Comité syndical, administrateur du Grand Saumurois,
comprendra 20 membres, 8 délégués de Saumur
Loire Développement ( le préfet ne connaît
que ce nom là ), 4 délégués de
la Communauté de communes de Doué, 4 de Gennes et
4 de Longué ; au bureau de 5 membres, un représentant
de chaque communauté. En somme, une confédération
qui rappelle vaguement la Confédération germanique...
L'Agglo de Saumur est réduite à la portion congrue
; elle occupe moins de la moitié des sièges, alors
qu'elle paie 68,9 % des frais de fonctionnement.
L'unité
de façade était peut-être à ce prix.
Le Grand Saumurois avance
de grands projets, il se dote d'une agence et d'un conseil de
développement et, bien sûr, d'un logo, à ne
pas confondre avec le sceau du Grand Saumur ( à droite ),
qui est une marque commerciale.
C'était trop beau ! Le 24 mars 2014, le préfet
émet un avis défavorable sur le SCoT jugé
« confus » et « peu prescriptif ».
Le renouvellement municipal de 2014 entraîne un changement
des dirigeants et de nouvelles tensions. A ce moment, tout reste
à faire. Mais le Grand Saumurois apparaît comme suffisamment
homogène pour offrir à ses territoires des perspectives
de développement multipolaire. A la condition que les ambitions
de notables et les intérêts de clocher soient dépassés,
que le SCoT ne se limite pas à un document répressif
et rébarbatif, qu'une coopération communautaire
se déploie. Pour l'instant, les habitants sont parfaitement
indifférents à ces grandes manoeuvres réservées
à quelques initiés.
7) La Communauté d'agglomération Saumur Val de Loire ( 2017 )
Du fait de la loi NOTRe
du 7 août 2015 ( Nouvelle Organisation Territoriale
de la République ), le Maine-et-Loire est secoué
en 2015-2016 par une tornade de restructurations administratives.
A la suite de fusions, le nombre des communes chute de moitié,
les intercommunalités tombent à neuf contre trente
auparavant. Des notables impérialistes et des préfets
napoléoniens mènent l'affaire à la hussarde,
sans réflexion approfondie des conseils municipaux et sans
association réfléchie de l'ensemble des citoyens,
ce qui constituait une exigence minimale. Ainsi disparaissent
des paroisses-communes vieilles de mille ans, ainsi disparaissent
des noms séculaires fleurant bon le terroir, remplacés
par de ridicules dénominations publicitaires, la plus minable
étant Bellevigne-en-Layon ; au moins, elles ne poseront
pas de problèmes aux toponymistes. Quand on présente
les Français comme incapables de se réformer !
En l'affaire, les Saumurois se sont hâtés plus
lentement. A juste titre, ils ont pris leur temps, d'autant plus
que certains notables périphériques ont freiné
des quatre fers. A Gennes d'abord, puis à Longué-Jumelles,
qui a rêvé de se tailler une petite principauté.
Ces opposants du Gennois et du Longuéen ont été
sanctionnés par les votes de leurs collègues. La
loi NOTRe et les pressions préfectorales aidant, un Grand
Saumurois est né, alors qu'il se cherchait depuis quinze
ans : par arrêté préfectoral du 16 décembre
2016 est créée, à partir du 1er janvier 2017,
la Communauté d'agglomération Saumur Val de Loire
qui regroupe 49 communes, dont trois nouvelles ( mises en
place sans consultation de l'ensemble des habitants ), ainsi que,
par fusion, la Communauté d'agglomération Saumur
Loire Développement et les communautés de communes
de Doué-la-Fontaine, Gennes et Loire Longué, au
total, une population légale de 100 424 habitants
[ Saint-Martin de la Place et Saint-Clément des Levées
ayant rejoint la commune nouvelle Gennes-Val-de-Loire, le nombre
des communes est tombé à 47 en 2018 ]. Certains
ont été choqués par les longues tractations
préalables, par le souci de représenter toutes les
sous-régions ( avec des proportions inégales ),
par les petits arrangements entre amis ( qui sont souvent
des ennemis ), par l'attribution d'indemnités généreuses
( qui scandalisent ceux qui vivent avec moins du SMIC ).
La démocratie locale passe forcément par ces accommodements
peu glorieux, par la création de sinécures, par
les compromis qui préparent la vie communautaire. Mais,
tant qu'elle n'a pas de fiscalité propre, la communauté
est une confédération ; consulter l'ensemble
des populations aurait été plus courtois, mais ne
s'imposait pas.
Le principal problème résulte de la lourdeur
et de la complexité des procédures ; dans ce
contexte, les fonctionnaires territoriaux sont amenés à
prendre plus de poids que les anciens secrétaires de mairie
et à s'ériger en technostructure plus ou moins camouflée
derrière les assemblées délibérantes.
L'ancien syndicat mixte du Grand Saumurois, dont nous sommes enfin
débarrassés, nous a déjà habitués
au jargon inefficace.
Voici une date significative : le 13 janvier 2017,
les 93 élus ont choisi pour président Jean-Michel
Marchand, encore maire de Saumur, et mis en place 15 vice-présidents.
Le Grand Saumurois devient une réalité administrative.
Réfléchissons toutefois sur la longue durée.
Que devient l'arrondissement de Saumur remodelé en 1926 ?
Le Vihiersois a depuis longtemps pris le large et s'est accroché
au Choletais ; " Baugé-en-Anjou "
et " Noyant-Villages " mènent une vie
indépendante. Deux communes du Gennois, Coutures et Chemellier,
se sont tournées vers Brissac et ont rejoint l'ensemble
Loire Layon Aubance. C'est donc un Saumurois assez homogène,
mais réduit à son noyau central, qui s'est ainsi
unifié. Le territoire de la sous-préfecture n'est
plus en adéquation avec les nouvelles unités et,
à plus forte raison la circonscription électorale.
Le jeu de quilles actuel peut entraîner d'autres chamboulements.
La ville de Saumur, avec ses maigres 27 000 habitants
( et qui vont diminuer ), a-t-elle le poids et le dynamisme
nécessaires pour contrôler une zone de plus de 100 000
habitants ? Par bonheur, des pôles secondaires, comme
Doué et Montreuil, constituent d'actives petites capitales.
Comme il est souhaitable que d'autres centres jouent ce rôle,
sept conseillers délégués, représentant
chacun un territoire sont élus pour participer au bureau
de l'agglomération. A défaut de siège unifié,
Saumur Val de Loire ne manque pas de dirigeants.
[ janvier 2018 : Saumur Val de Loire se dote d'un projet de territoire à l'échéance de 2028 ( lien pour le lire en PDF ). Il est toujours facile d'ironiser sur ces ambitions lointaines, synthétisées par le cabinet Cap Nova, et sur leur langage placé sous le sceau répétitif du développement durable. Il faut plutôt se réjouir d'assister à la naissance d'une communauté nettement plus opérationnelle que feu le Grand Saumurois, de lire un document clair et sans jargon technocratique, de constater le choix réaliste de donner la priorité à la qualité de vie ].
Ami lecteur, je
reconnais que cette énumération de structures a
été fastidieuse. Ce n'est pas de mon fait, je me
suis au contraire efforcé de simplifier en éliminant
des faits subalternes.
Au final, en 2017, le citoyen lambda de Saumur se retrouve
dirigé par 5 maire et maires délégués,
par 10 adjoints, par un président, 15 vice-présidents
et 7 conseillers délégués ; ce total n'est
peut-être déjà plus exact , car il varie sans
cesse. Ces responsables sont fort logiquement indemnisés,
car leurs charges les prennent beaucoup ; malgré tout,
ces indemnités paraissent trop généreuses,
alors que, dans un autre sens, les élus de base s'astreignent
à participer à de multiples réunions fastidieuses
pour presque rien. Ces exécutifs ont besoin de bureaux,
de secrétariat et de personnel. Il s'ensuit une inflation
des employés des collectivités locales. La justification
de ces regroupements était de réaliser des économies
d'échelle ; on n'en prend pas le chemin.
Le 5 octobre 1953, le Conseil municipal de Saumur adoptait
son tableau des effectifs, qui s'élevait alors à
104 agents ( 49 titulaires et 55 auxiliaires permanents
- A.M.S.,
1 D 48 ) ; la ville assurait alors le service d'eau,
le gaz et la répurgation. Pour obtenir des éléments
de comparaison homogènes, il faudrait ajouter une douzaine
d'agents des communes périphériques, soit moins
de 120 employés pour l'ensemble de l'agglomération.
Des services sont alors réduits et parfois inexistants
: une seule bibliothécaire à temps partiel et pas
d'archiviste spécialisé. Pour toutes sortes de raisons,
en particulier un élargissement du champ d'intervention
et un allégement des horaires du personnel, les employés
de la Ville de Saumur se retrouvent au nombre de 503 en 1982 ( 325
permanents et 179 à temps partiel ), de 436 en 2001,
de 542 en 2006. En 2014, les effectifs municipaux semblent stabilisés
à 530 personnes, mais Saumur agglo a pris en main d'importants
secteurs d'activités et emploie environ 150 agents sur
un espace plus étendu. Les nombres ne sont pas totalisables,
mais il est patent que le nombre des employés des collectivités
locales est en constante augmentation et que les charges de personnel
progressent en pourcentage dans les budgets. En outre, les grands
travaux, pour lesquels l'appel à des sociétés
d'études est obligatoire, connaissent aussi une forte inflation
des prix.
Bien d'autres organismes veillent aussi sur nous et sur
notre territoire. Le Parc naturel Loire-Anjou-Touraine protège
nos paysages ; le Conservatoire régional des Rives
de la Loire et de ses Affluents ( CORELA ) établit
un programme d'actions pour la restauration des boires ; le Schéma
d'Aménagement et de Gestion des Eaux entend rétablir
à coups de bulldozers la continuité écologique
du Thouet. Tous ces organismes, dont je ne cite que quelques uns,
représentent l'équivalent de quelques agents supplémentaires.
Jamais nous n'avons été autant administrés
et par des personnes, élus ou agents, dont la compétence
n'est pas en cause, mais nous voyons mal l'efficacité de
cette pléthore. Saumur et sa région vont mal, les
diverses administrations emboîtées apparaissent comme
peu efficientes et présentent des doublons évidents.
Tout élu veut laisser son empreinte par des réalisations
pharaoniques, et nous avons de plus en plus d'élus... De
nouvelles restructurations sont en perspective ; elles seront
sûrement lentes à se stabiliser.