1) La dramatique crise du logement de l'après-guerre
Inimaginable pour les
jeunes générations, le dénuement des Saumurois
était total au sortir de la guerre. L'ampleur des destructions
de 1940 et de 1944 avait causé une éprouvante pénurie
de logements. On s'entassait un peu partout, y compris dans des
caves demeurantes de Fenet ; des familles ouvrières
s'étaient installées dans des HBM devenues vacantes
par suite du départ des militaires ; quand l'armée
réintègre Saumur, treize familles reçoivent
un avis d'expulsion en septembre 1945 ( A.D.M.L., 97 W 77 ).
En 1946, lorque l'Eden, la maison de tolérance, est fermé,
ses locaux sont réquisitionnés et les pouvoirs publics
y entassent pêle-mêle des ménages de sous-officiers
et des ouvriers travaillant sur les chantiers des ponts. Nous
avons déjà évoqué les baraquements
installés en particulier sur l'avenue David d'Angers, sur
les places des Ardilliers ou de la Boire-Quentin, baraquements
encore habités en 1956 ( d'autres abris en bois servaient
de magasins et d'entrepôts, notamment sur la rue Nationale ).
La situation est aggravée par le baby boom,
par l'arrivée de jeunes gens des communes rurales voisines
et par un retour massif des militaires. La reconstruction
des logements bombardés, menée, faute de moyens,
à un rythme assez lent, ne peut suffire à contenter
les demandes des sans-logis et des mal-logés. Le recours
à des plans plus ambitieux apparaît comme une ardente
nécessité.
2) La décision de créer de nouveaux lotissements
Je n'ai pas trouvé
trace d'un débat théorique, mais, à partir
du 21 novembre 1952, chaque séance du Conseil municipal,
à peu d'exceptions près, est marquée par
une évocation du problème du logement et par une
décision concernant une construction nouvelle. Les maires
Emmanuel Clairefond et Fernand Angibault se révèlent
de grands bâtisseurs ; peu entravés par les
réglementations, ils prennent les décisions fondamentales
sur l'extension de l'emprise urbaine de la ville. Ils sont épaulés
par Pierre Marembert, au départ conducteur des travaux
de la ville, puis architecte associé avec Pierre Brunel.
Le deuxième acteur de cette relance de la construction
est l'Office public des Habitations à Bon Marché
( HBM ) ; lancé modestement le 25 avril
1929, ce dernier avait surtout réalisé deux lotissements
de cités-jardins, aux
Violettes et aux Moulins ; malgré leur charme
incontestable, ces deux ensembles ne représentent que 140
logements, ce qui est mince par rapport aux besoins. Cependant,
l'office municipal, qui ne construit plus depuis 1933, tout en
encaissant des loyers, présente une situation financière
saine.
Quelques décisions nationales favorisent la relance
; la loi du 3 septembre 1947 institue des prêts du Trésor
à 2 % sur 65 ans ( compte tenu de l'inflation
galopante, c'est une excellente affaire ) ; cette loi rend
aussi obligatoire l'installation d'une salle d'eau dans toute
construction nouvelle. Plus importante encore, la loi du 21 juillet
1950 favorise le financement des logements sociaux en conférant
aux prêts la garantie de l'Etat ; elle rebaptise les
HBM en HLM ( Habitations à loyers modérés )
et leur donne pour ambition de s'ouvrir aux classes moyennes,
sans se cantonner aux seuls besoins des familles indigentes.
La ville de Saumur n'avait pas attendu cette loi pour agir
; dès 1949, elle relance son office public municipal, en
lui accordant une dotation de 5 millions de francs, et, en avril,
le maire demande à l'office départemental la création
de 320 logements, complétés par 100 autres destinés
à héberger des familles vivant dans des taudis ( A.D.M.L.,
97 W 77 ). Le fonctionnement se rôde de 1949
à 1952 ; la ville prend les grandes décisions,
elle nomme l'architecte en chef des lotissements et exproprie
les terrains ; l'Office public d'HLM de Saumur ( directeur
Brégère ) assure la réalisation des
travaux et gère les logements. Afin d'élargir le
dispositif et de lui apporter une plus grande souplesse, la ville
crée en décembre 1958 la Société Immobilière
d'Economie Mixte de Saumur ( SIEMS ), qui peut obtenir
des financements croisés et qui réalise des immeubles
de meilleur standing. A ajouter la SIEMRS pour la région
de Saumur et la SEMISAU pour le Secteur
sauvegardé. L'Office Départemental des HLM intervient
aussi en périphérie, notamment à Saint-Lambert-des-Levées,
sur la cité Beauséjour, à l'extrémité
de l'avenue David-d'Angers.
Bibliographie essentielle
- Saumur. La Reconstruction
[ s.d. ], dépliant publié par l'Inventaire
des Pays de la Loire ;
- Présentation par Arnaud Bureau dans Eric Cron, Saumur,
urbanisme, architecture et société, 303, 2010 ;
- 75 ans d'habitat social, Saumur Loire Habitat, 2004.
3) Les premiers ensembles collectifs
Dans les années 1953-1956, sont réalisés de front des ensembles collectifs de taille moyenne, dispersés sur les marges de la ville ancienne.
-
La cité Millocheau constitue la première réalisation
ambitieuse de la ville, qui avait acheté les terrains dès
1949. En premier lieu, l'aménagement exigeait une digue
de protection contre les crues : le 13 mars 1953, le Conseil municipal
garantit l'emprunt de 2 000 000 de F lancé par l'OP-HLM
pour construire cette levée, devenue le boulevard Joly-Leterme
( A.M.S., 1 D 48 ). Les 203 appartements,
dont la construction s'étale jusqu'en 1968, sont, à
l'évidence, réalisés à l'économie.
Une réhabilitation s'est efforcée d'apporter un
peu plus de confort dans cet ensemble qui a très mal vieilli
( à droite ), bien que ses locataires jugeaient
l'environnement agréable.
- Les premières tranches supplémentaires des Violettes sont réalisées à la même époque : le 13 mars 1953, le Conseil municipal approuve la délibération de l'OP-HLM décidant d'édifier un premier ensemble de 34 logements.
- La cité de l'Oillerie est aménagée pour loger des militaires.
- Sur le coteau, en prolongement de la cité Lamartine, est réalisé un petit ensemble au clos Pichard.
- A l'extrémité de la rue Emmanuel-Clairefond, les HLM édifient, de 1955 à 1970, des immeubles caractérisés par le nombre élevé d'appartements T 5 et de ce fait destinés aux familles très nombreuses.
- En 1956, au
bout de la rue Robert-Amy, est lancée la populeuse cité
Laurent-Bonnevay ( les LOPOFA, Logements Populaires et Familiaux,
l'arrêté du 23 novembre 1955 instituant cette variété
de HLM de qualité inférieure ). Ils accueillent
en priorité des familles du quartier de Fenet qui avaient
été évacuées en raison des éboulements
et de l'insalubrité. « La cohabitation entre
les locataires verticaux ( lopofistes ) et les locataires
horizontaux ( ceux du cimetière tout proche )
suscite quelques remous dans l'opinion des gens bien-pensants,
qui voient dans la fête annuelle du quartier un outrage
au repos éternel », Nicolas Jolivot et Marcel
Druard, Nos années 60-70 à Saumur, Cheminements,
1999, p. 44. Malgré d'importants travaux d'isolation et
d'amélioration du cadre, les 454 appartements, trop déficients,
ont dû être déconstruits (opération
en cours, à droite ).
4) Le lotissement des Chapes Noires
Par délibération
du 29 janvier 1954, le Conseil municipal charge l'architecte Jean
Boisset d'établir les plans du lotissement des Chapes Noires
projeté sur les terrains des clos Pichard et Grolleau.
L'entreprise témoigne d'ambitions supérieures, car,
cette fois, la ville s'agrandit sur une colline assez escarpée
et isolée par rapport au reste de la cité. L'objectif
est de réaliser un quartier autonome, doté d'un
centre commercial et d'une école. Sans tour élevée,
mais composé de barres d'orientation différente,
ce grand ensemble présente plus de variété
que les mornes alignements de la période précédente
( il est ici photographié en 1968 par l'opérateur
Roger Henrard - A.M.S., 13 Fi 129 ). Assez efficacement réhabilité,
le quartier n'est pas menacé de destructions ; cependant,
il est resté sans vie propre, la place centrale n'étant
pas devenue un pôle d'animation et les écoles étant
implantées sur les marges, au Clos Coutard. Malgré
cette existence paisible, une bande à la réputation
patibulaire avait donné une mauvaise image au lotissement,
qui est privé de son
curieux nom en 1993 et rebaptisé par un banal " Hauts
Quartiers ".
Jusqu'ici la ville et les HLM ont sans cesse mené plusieurs chantiers de front, sans compter les lotissements ou les immeubles privés. En 1967, l'OP-HLM de Saumur gère 1 664 logements, total qui peut paraître considérable, mais qui s'avère encore insuffisant, d'autant plus que la population continue à augmenter quelque peu et que depuis le Baby Boom, les familles sont nombreuses.
Le projet de créer
un vaste quartier conquis sur les prairies du Thouet n'était
pas envisagé dans les plans d'extension de Jean Hénin
ou d'André Leconte. Cet agrandissement considérable
de la ville n'apparaît qu'en 1958, quand est décidé
l'aménagement de la zone industrielle du Clos Bonnet :
il serait souhaitable de loger les ouvriers à proximité
de leur lieu de travail. Un premier projet datant de cette année
1958, donc de la municipalité Angibault, envisage seulement
trois groupes scolaires ( A.M.S., T 3 ) ; un second,
plus abouti et plus colossal, établi en mai-juin 1960,
prévoit 1 800 logements, 6 groupes scolaires, un terrain
de sport, une levée de 20 m de large et une voie centrale
de 12 m. Parmi les noms des divers urbanistes qui interviennent
sur le dossier, on relève celui d'Henri Madelain, architecte
au M.R.U. d'Angers, car le classement en ZUP ( Zone à
Urbaniser en Priorité ) suppose une supervision par les
services préfectoraux, qui ont la haute main sur le projet,
et non pas la municipalité ou les HLM locaux. En 1961,
la ville reçoit des propositions de Georges-Marc Présenté,
qui dirige le cabinet d'exécution de Le Corbusier ;
son correspondant vient rendre une visite au maire Lucien Gautier
et il lui propose d'étudier la réalisation d'une
« cité radieuse ». Le Conseil municipal
décide de ne pas donner suite, d'autant plus que son projet
de ZUP est pratiquement bouclé. Mais le Chemin Vert est
bien dans la continuité de Le Corbusier, surtout dans ses
aberrations. Il s'agit de mettre en place un quartier autonome,
sans grand souci des liaisons avec le reste de la ville, mais
disposant d'un collège, de groupes scolaires et d'un centre
commercial, un ensemble formé de tours et de barres pour
la zone d'habitat collectif et de pavillons pour la zone de lotissements
familiaux. En
annexe, le Conseil municipal décide en mars 1973 d'aménager,
de l'autre côté de la levée sur les prairies
du Thouet, des terrains de sport, un plan d'eau et une zone remblayée
destinée à devenir un parc des expositions.
Les travaux commencent
en 1966 sur un projet de 880 logements. Le cliché de gauche
montre le gigantisme du chantier, à coup sûr le plus
important que la ville ait connu depuis le pont Cessart. En premier
lieu, construction de la digue de 20 mètres de large, devenue
le boulevard de la Marne et remblaiement général
du terrain. Les terres viennent de la colline du Clos Bonnet,
qui est éventrée ; la zone industrielle et
la ZUP sont aménagées en même temps ; cette
vue aérienne fait ressortir ces liens et montre les bouleversements
intervenus dans un secteur longtemps agreste et désert.
Si l'on recherche les étapes de l'intrusion de la
ville dans ce coin perdu, elle commence par l'implantation du
cimetière à partir de 1810 ( identifiable grâce
à ses cyprès ). La petite route de Varrains, étroite
et sinueuse, devenue rue du Grand-Cimetière, puis rue Robert-Amy,
est bordée par de petites maisons datant surtout du début
du XXe siècle. Entre temps, la modernité fait une
percée sous la forme de la
voie ferrée Saumur-Poitiers construite dans les années
1869-1876. Cette ligne enserre et isole le secteur ; le pont
très étroit prolongeant la rue du Pressoir est bien
insuffisant pour desservir les nouveaux quartiers. La voie ferrée
a joué un rôle dans l'essor du quartier ; elle
explique l'implantation de la verrerie, devenue usine des Tabacs,
puis musée des Blindés, tache claire bien identifiable
à gauche de la ligne de chemin de fer. Le choix du Clos
Bonnet pour la zone industrielle s'explique par la jonction des
voies venant de la gare de l'Etat et du tunnel. Les alignements
serrés des LOPOFA marquent l'arrivée en force de
lotissements d'un type nouveau.
Cette nouvelle photo aérienne de 1967 correspond au commencement des travaux : les grues sont arrivées et les fondations en cours sur plusieurs secteurs.
Sur cette nouvelle photo de 1969, le groupe scolaire est achevé et utilisé à partir de la rentrée de 1971. La plupart des tours en sont au stade des finitions. Le centre commercial sort de terre.
Ce cliché de 1971 montre que la partie collective est alors à peu près achevée ; la Manivelle, à droite, est toute pimpante, de même que le collège dans sa première version. En bas, la zone des lotissements familiaux est encore en plein chantier, mais les rues, bien raides, sont tracées.
C'est en 1976, que l'opération est considérée comme terminée. C'est aussi à cette date que les décideurs prennent conscience de leurs erreurs et arrêtent les premières mesures pour « déminéraliser » le quartier et pour casser les lignes droites.
6) Les Trente Glorieuses de la construction saumuroise sont-elles si glorieuses ?
Jamais on n'avait autant
bâti que dans ces années 1946-1976. La ville offre
11 755 logements en 1975 et 13 128 en 1982 ( selon
les données des recensements ). Désormais,
la crise du logement est à peu près résorbée.
A Saumur, on compte 2,71 personnes par unité d'habitation
en 1982, alors que cette valeur se monte à 2,92 pour l'ensemble
du Maine-et-Loire. Le nombre des logements vacants commence à
progresser. Les HLM offrent 2 604 logements dans la ville et hébergent,
à des prix abordables, 23,4 % de la population. Désormais,
la majorité des Saumurois habite dans une construction
récente, 41,9 % dans un bâtiment des années
1949-1974 et 16,7 % dans une réalisation des années
1975-1982 ( alors que 31,2 % réside dans
un logement antérieur à 1914 ). Même
à l'époque où Louvet et Joly-Leterme couvraient
la ville de nouveaux monuments et réaménageaient
des rues entières, on n'avait jamais autant construit.
Il convient de souligner avec force l'ampleur et l'ambition de
ces grands travaux, avant d'émettre de sérieuses
réserves.
Ces nouveaux ensembles font tout pour donner des apoplexies
à des écologistes. Pas d'espaces verts, ce qui est
particulièrement impardonnable quand on construit sur les
prairies du Chemin Vert. Tout pour la voiture, de vastes parkings
goudronnés avec rage, de longues lignes droites dangereuses
pour les enfants. Au Chemin Vert, dès 1976, alors qu'on
achève les dernières constructions, les pouvoirs
publics prennent les premières mesures de correction. En
ces temps de pénurie, l'isolation thermique et phonique
s'avère très déficiente ; il a fallu doubler
les murs extérieurs, solution provisoire qui n'a pu empêcher
les « déconstructions » des LOPOFA,
ainsi que de tours et de barres au Chemin Vert. S'y ajoutent beaucoup
d'erreurs ou de malfaçons ; la cheminée de la chaufferie
centrale du Chemin Vert a longtemps empesté le quartier ;
le collège voisin est recouvert d'une terrasse, alors qu'un
toit s'imposait : en raison de problèmes d'étanchéité,
il a fallu reconstruire l'essentiel des locaux.
Sur le plan financier aussi, les opérations n'ont
pas été si fructueuses. L'OP-HLM et la SIEMS connaissent
de sérieuses difficultés sur lesquelles nous reviendrons.
L'entreprise Bellati Père et Fils, spécialiste du
béton armé, qui avait construit les LOPOFA et une
partie du Chemin Vert, qui avait atteint l'effectif de 193 salariés
en 1970, dépose son bilan en 1973 ( Laurent Garino,
La charrette à bras. Histoire des Italiens de Saumur,
Cheminements, 2006, p. 132-137 ). Sa rivale, l'entreprise
Montico ( les Violettes, l'agrandissement des Nouvelles Galeries )
disparaît à la même époque.
Si ces « cages à lapins » prennent
aujourd'hui une image fort négative, il convient tout de
même se replonger dans la rudesse du temps : les nouveaux
logements offraient un confort élémentaire qui était
souvent absent dans les quartiers anciens ; quitter un appartement
cher et spartiate du centre-ville pour passer dans un logement
de la SIEMS constituait un net progrès. Catherine Becdelièvre
et Isabelle Roger, Les Saumurois et leur logement, 1979
( A.M.S., A br/295 ) ont mené des entretiens sur le
ressenti des résidents. La cité Clairefond et la
Croix Verte, où règne un sentiment d'insécurité,
reçoivent des avis très négatifs. Au Chemin
Vert, les deux tiers des habitants se déclarent plutôt
satisfaits. Dans l'ensemble, les plaintes les plus fréquentes
portent sur l'exiguïté des appartements et sur les
bruits de voisinage. Les résidents déménagent
à un rythme rapide ; pour beaucoup, l'installation
dans un grand ensemble constitue une solution provisoire en attendant
mieux ; ils ne s'attachent guère aux quartiers, qui, malgré
des tentatives, manquent de tissu relationnel. Selon une autre
étude de 1985, la médiocrité de la vie sociale
fait davantage fuir les habitants que les conditions matérielles.
Elargissons la perspective à l'ensemble des choix
urbanistiques et architecturaux de l'époque. Le manque
bien réel de moyens n'explique pas tout, les goûts
exécrables du temps ont aussi fait des ravages. Dans la
ville ancienne, les constructions nouvelles ne valent guère
mieux, en général banales ( le nouveau Palais
de Justice ) ou contestables ( les nouvelles halles )
et parfois tombant dans le pire : la première annexe
de l'Hôtel de Ville, côté théâtre,
était tellement laide qu'il a fallu reprendre sa façade
et exiler sur le quai l'Allégorie de la Loire qui la décorait.
Dans les constructions publiques, l'Education nationale manifeste
exceptionnellement une certaine recherche, notamment dans l'école
maternelle de l'Arche Dorée ( Jean Gounaud )
ou dans l'internat du Lycée d'Etat, complété
par un escalier monumental orné de sculptures de Robert
Juvin, ensemble supervisé par Brunel et Marembert, qui
édifient aussi la Cité technique. La façade
d'ardoise de la MJC, sur la place
Verdun, témoigne d'une intéressante originalité.
Dans la construction privée, on retiendra la curieuse " Banane "
construite par Alexandre Bourge en 1957 ou la résidence
Gambetta avec sa piscine sous le toit ( Jean Gounaud, 1969 ).
Quoi qu'en disent les urbanistes et les architectes, copier l'ancien
est souvent la meilleure solution dans le centre-ville :
l'agrandissement de la Poste, côté rue de la Grise,
prolonge l'ancien bâtiment sans rupture choquante. Dans
le secteur sauvegardé, la réhabilitation à
l'ancienne donne de remarquables résultats.
Au total, en matière de logement, les Trente Glorieuses
nous ont apporté la quantité à défaut
de la qualité ; c'est finalement la zone
de la reconstruction qui présente le bilan le plus
satisfaisant.
7) Le ralentissement de la construction dans le dernier quart du siècle
L'édification
de l'îlot Dacier fait le lien entre deux époques.
Il confirme la tradition des tours élevées, serrées,
sans air et sans verdure ; malgré le souci de jouer
sur les formes et les volumes, cet ensemble criard détonne
dans l'environnement du château. L'opération est
stoppée en 1980.
Passée cette date, la construction se ralentit. Principaux
promoteurs, l'OP-HLM et la SIEMS ne bâtissent rien pendant
quinze ans ; ils se consacrent surtout à la réhabilitation
de leur parc déjà bien dégradé. En
outre, la population de la
ville est en déclin, ce qui entraîne la montée
du taux de vacance dans les nouveaux quartiers ( Centre d'Etudes
techniques de l'Equipement de l'Ouest, Saumur. Etude Habitat,
juin 1985, B.M.S., A 799 ). Chaque année, 600 locataires
de l'OP-HLM déménagent, 170 pour un autre logement
de l'office, 430 pour un logement privé ou pour aller ailleurs.
La masse des impayés va en croissant. La SIEMS doit être
renflouée, afin d'éviter sa faillite ; l'OP-HLM
subit des crises sérieuses, un conflit violent avec une
association de locataires, une condamnation pour écritures
falsifiées et même une affaire d'écoutes téléphoniques...
8) Un nouvel âge de la construction au début du XXIe siècle
Les premières années
du XXIe siècle sont d'abord caractérisées
par la réhabilitation des Zones urbaines sensibles et par
la mise en route d'un ambitieux Plan de Renouvellement Urbain
( voir au dossier précédent ).
Ce plan débute par de nombreuses déconstructions :
la Manivelle, née en 1968, n'aura pas vécu 40 ans,
puis qu'elle est abattue en 2007.
Les constructions nouvelles dépassent rarement les
quatre étages et donnent une large place aux maisons individuelles ;
dans un souci de mixité sociale, les HLM s'y mélangent
avec les réalisations privées. Le bois y remplace
souvent le béton brut et le cadre est verdoyant. Les nouvelles
constructions sont HQE ( Haute Qualité Environnementale )
ou BBC ( Bâtiment Basse Consommation ) ; les ouvertures
étroites favorisent le confort intérieur, mais elles
nuisent à l'élégance extérieure. Par
exemple, l'îlot Fricotelle ( à gauche )
a l'allure d'un centre pénitentiaire ).
A droite, les nouveaux locaux de la Chambre de Commerce, place Balzac, présentent une intéressante monumentalité.
Les nouveaux quartiers se développent au-delà des grands ensembles, au Vigneau pour l'ancienne commune de Saumur, mais surtout sur la périphérie méridionale ( les Gravelles, les Guéderies, les Aubrières, le Vaulanglais ). Voir les zones de couleur orangée sur le plan des aménagements urbains.
Selon les statistiques
de l'INSEE, la ville de Saumur a atteint son maximum d'unités
de logement en 2006.
Depuis lors, le nombre des logements vacants est passé de 1 221 en 2006 à 1 834 en 2011. L'Office public Saumur Loire Habitat, fusionné avec la SIEMS en 2012 et devenu Saumur Habitat, gère au total 3 594 logements, dont une partie est située hors de la commune, comme on peut le constater à partir des statistiques ci-contre. Dans la ville de Saumur, les données sont à la baisse, à part le nombre des propriétaires.
Le cas du Chemin Vert est spectaculaire : il est prévu d'y détruire 564 logements et d'en reconstruire 105 seulement. Le temps des grands ensembles est révolu.