NOM ACTUEL : place de la BILANGE
 

 QUARTIER : Bilange Saint-Nicolas
   

Premières dénominations : Grand terrain vague qui accueille le marché hebdomadaire du samedi depuis le XIIe siècle.
La première apparition du mot, A.D.M.L., 46 H 1, n° 1 Le nom apparaît entre 1150 et 1200, dans une charte où Marie de Maillé donne une maison située "in bislenchia salmuriensi" ( A.D.M.L., 46 H 1 n° 1 ). Le mot devient "Bislengia" en 1218 ( A.D.M.L., H suppl. B 156, fol. 6 ). La forme française "la Billenge" est attestée en 1268.
 Sans le moindre doute, le nom vient du mot Bilanx, qui devient Bilancia en latin populaire et qui désigne une grande balance caractérisée par un fléau porteur de deux plateaux. Les explications à partir d'une imaginaire statue d'un " bel ange " sont des billevesées.
XVIIe-XVIIIe siècle : Ce nom se référant à une grande balance publique présente une grande stabilité et s'étend à tout le "quartier des Bilanges", qui désigne le faubourg de Saint-Nicolas.
 Exceptionnellement apparaît la "place du Grand-Marché", par exemple chez Bernard de Haumont, au début du XVIIIe siècle.

1794-1808 : place du Salut Public,Inscription d'époque révolutionnaire gravée par Pierre Bernier quand la guillotine est implantée à l'emplacement du pilori. Pierre Bernier grave ce nouveau nom à l'angle de la rue de la Petite-Bilange ( vestige à droite ).

1808-1818 : Napoléon lui donne son nom depuis qu'il est venu passer une heure dans l'Hôtel Blancler.

Depuis 1818 : Retour au nom primitif, que, selon la loi du moindre effort, les Saumurois abrègent souvent en "place Bilange". 

 Toute marchandise dépassant 25 livres de masse doit être pesée sur la balance légale, si elle est mise en vente, non seulement sur le marché, mais sur tout l'espace de la ville. La redevance exigée s'élève à un sol pour cent livres de masse, c'est la taxe de poids-le-roi, qui revient en partie à l'abbesse de Fontevraud depuis le 20 septembre 1218.
 Les négociants ne trouvent pas cette taxe trop lourde, ils se plaignent surtout de devoir transporter leurs produits sur une place encombrée et à l'accès difficile. Ils préfèreraient acquérir contre argent l'autorisation de détenir une balance à leur domicile, et quelques uns fraudent... Finalement, la municipalité rachète à l'abbaye le droit de poids-le-roi en 1759.

 La place primitive ne s'ouvrait pas vers la Loire et entretenait de faibles rapports avec le fleuve par l'intermédiaire du minuscule "port de la Bilange", appelé aussi le "port Ronsart", du nom d'une influente famille d'administrateurs locaux.
Plan de Rousseau, 1737 Comme l'ensemble de la cité, la place a constamment glissé vers l'ouest. A ses origines, elle était plus étendue sur son versant oriental, atteignant la tour Cailleteau et les remparts encadrant la porte de la Bilange. Cet espace est constamment rétréci, comme on le voit sur cet extrait d'un plan de 1733. Vers 1556 est construit le grand jeu de paume situé devant la muraille ; les terrains vagues du voisinage sont allotis à partir de 1615 et surtout après la destruction de la porte de la Bilange en 1779 ; c'est alors qu'est prolongée et régularisée la rue Saint-Jean.
Plus bas, vers l'ouest, le cercle peut représenter l'emplacement du pilori ( qui attirait tant les badauds ). Au-dessous, l'alignement correspond aux façades actuelles, alors que vers la Loire, l'îlot occupé alors par la raffinerie de salpêtre a été considérablement rogné.


 

 L'ouverture du pont Cessart en 1770 bouleverse la structure, l'orientation et le rôle de cette place. Le plan ci-dessous décrit cette restructuration :

Plan du réaménagement de la place de la Bilange


 Le grand jeu de paume apparaît en haut, à côté de la rue Saint-Jean en cours de prolongement ( il en subsiste quelques vestiges ). Vers la gauche, le petit port a été comblé et remplacé par la culée du pont et les larges quais qui ont considérablement étiré la place vers le nord ( à gauche ). Cependant, la construction de la salle de la Comédie, puis du Théâtre, a repris une part de l'espace gagné sur le fleuve. Toutefois, une halle couverte occupait le rez-de-chaussée de la Comédie, agrandissant le marché et servant de grenier d'abondance.
 Surtout, la place, jusqu'ici mal desservie par quatre rues étroites, prend une orientation nouvelle en s'inscrivant au coeur de la nouvelle traversée nord-sud, qui n'est achevée que vers 1823 avec les nouveaux immeubles de la rue Franklin-Roosevelt. Elle est la seule grande place du centre de la cité ( dans la ville close, la place Saint-Pierre étant réduite à un carrefour, et l'actuelle place de la République étant d'aménagement tardif ).
 Sur le versant occidental, en bas, les démolitions prévues pour la construction du pont Cessart sont importantes ; elles vont jusqu'au trait. C'est alors que disparaît la maison du Pesage, la domus de pondere souvent citée dans les actes médiévaux, avec sa cour et sa halle au-dessus, correspondant à la lettre A.

 Les urbanistes du XVIIIe siècle ont projeté d'aménager une place régulière constituant une majestueuse entrée urbaine. Les travaux ne sont exécutés qu'au débouché de la rue Molière. Par la suite, chaque décennie apporte son lot d'immeubles, contribuant à rétrécir cette place animée, mais plutôt hétéroclite.

 Nous connaissons la population de la place au recensement de février 1790 ( étudiée par M. Appeau, Anciens élèves des Récollets, n° 6 ). Bien que l'îlot de la raffinerie de salpêtre ne soit encore qu'en partie reconstruit, la place compte officiellement 202 habitants répartis sur 45 foyers. Ce nombre est légèrement exagéré, car les 12 compagnons et commis recensés n'habitent pas toujours sur place ; une partie loge ailleurs dans la ville et se trouve compté deux fois.
 Le quartier héberge quelques familles qui figurent parmi les plus riches de la ville : les héritiers du riche négociant Pierre Blancler-Pupier ou Jean Miet, entrepreneur des ouvrages du Roi. Pour l'essentiel, soit une quarantaine de feux, il est occupé par des marchands et par des artisans qui vendent eux-mêmes leur production. Citons au hasard, trois cafetiers et un aubergiste ( nous sommes sur une place de marché ), un seul boulanger, deux apothicaires, deux horlogers, l'imprimeur Antoine Latour, deux perruquiers, deux cordonniers, le marchand de faïence Mathieu Lamarche, six couturières et marchandes de mode...
 La place de la Bilange est socialement diversifiée et manifeste une forte activité, issue de sa fonction marchande. Il n'est pas surprenant d'y trouver en outre 39 domestiques ( 29 femmes et 10 hommes ), employés dans les maisons bourgeoises ou dans le commerce, et logés sous les toits dans des soupentes.

 En 1913, la plaee offre sur son pourtour huit cafés; complétés par des commerces très variés. Son centre est remodelé à peu près tous les dix ans. Une halte pour le tramway y fait une courte apparition.

 Dans les premières années du siècle, la place est brillamment illuminée par de curieux lampadaires, comprenant quatre becs de gaz surmontés par une énorme ampoule électrique :

Place de la Bilange dans les années 1900


 La place en 1905 :

Carte psstale de Dando-Berry

 

Vers 1908-1910 ( observer l'imprimerie Roland au départ de la rue de la Petite-Bilange )
Carte postale LL

  

Dans les années 1950, alors qu'elle est décorée par une petite fontaine, très vite remplie de terre :
place de la Bilange années 1950

 

 

Dans les années 2000, la galerie marchande est apparue, ainsi qu'à gauche, des jets d'eau capricieux :
Place de la Bilange, années 2000

 

Février 2018, début des travaux du réaménagement de la rue Franklin-Roosevelt et de la place de la Bilange. Ces lieux un peu biscornus et névralgiques pour la circulation sont difficiles à structurer et les fréquentes transformations antérieures ont rarement été heureuses. Ces erreurs accumulées nous rendent passéiste, d'autant plus que le premier travail exécuté est l'abattage de beaux arbres, qui recouvraient d'une ombre douce des bancs très fréquentés.

Abattage des liquidambars place de la Bilange


Abattage le 8 octobre 2018

Abattage des liquidambars le 8 octobre 2018

N° actuel

AUTOUR DE LA PLACE

Voir dossier sur les théâtres1 à 6 place de la Bilange



1 à 6 - L'immeuble de la Bourse et les maisons suivantes sont édifiées en 1772-1773, dans le style des façades de la rue Molière. Plus loin, deux petites maisons en avancée reprennent ces caractéristiques.
Etiquette de Livérani

 

 


 

4 - La chapellerie Livérani est très cotée.

 

 

 

 

 

 

 

 


6 à 12 place de la BilangeVersant oriental de la place - Un entassement d'immeubles du XIXe siècle est édifié en avant de l'ancien jeu de paume ; les espaces vides correspondent à des verrières apportant un éclairage zénithal à de grands magasins. Le XXe siècle n'a rien arrangé : la galerie de circulation permet une nouvelle avancée des boutiques et vient donner le coup de grâce à ce naufrage architectural.



15, place de la Bilange

 

 

 


15 - Grand immeuble solennel de 1876, couvert de moulures, de blasons, de frontons, de fruits, de fleurs et portant les initiales " CP ".

 


 

16 - Maison portant la date de 1731 sur sa lucarne.

 

 

 

17 - Immeuble remontant à 1746 ( date tronquée ).



Par rapport à cette carte postale remontant peu avant 1914, les immeubles ont peu changé. A l'époque, le " Café saumurois "est tenu par Pierre Berteau ; la maison d'angle est constamment un estaminet ; le mot "Karcher" désignait alors une bière.

Départ de la rue Saint-Nicolas (rue Emile Zola), à la veille de 1914

 



23 - Un important magasin d'instruments de musique    23 plance de la Bilange

 


 Voir dossier sur l'Hôtel Blancler, construit sur l'emplacement de l'hôtellerie de la Corne.


 

Angle de la rue de la Petite-BilangeAgence 25 place Bilange

 

 


25 - A l'angle de la place et de la rue de la Petite-Bilange, ce petit immeuble édifié à la fin du XVIIIe siècle a fixé le nouvel alignement des façades. Côté place, une agence tenue par un certain A. Lemert, par ailleurs joueur d'accordéon et montreur de chiens savants.


 

 

 

 

 




Hôtel Budan vers 1910


Angle de la place et du quai Carnot - L'hôtel Budan, à l'époque de sa splendeur.
 Jules-Hippolyte Budan ( sans rapport de parenté avec la famille Budan de Russé, décédé à Chaintres en 1864 ) édifie ce vaste ensemble immobilier à partir de 1850 ( architecte probable Gustave Svanberg, d'origine prussienne et réfugié politique à Saumur ). Très bien situé au débouché du pont Cessart, sur l'emplacement de la raffinerie de salpêtre, cet hôtel luxueux, achevé vers 1852, devient la résidence obligée de toutes les personnalités de passage. Son décor classique comporte en partie des stucs peints et résiste mal aux intempéries. Le Café de la Ville est élevé en suivant les mêmes proportions.
 ( Voir compléments pour le quai Carnot )






Quincaillerie A la Flotte anglaise

 

Aux Forges de Vulcain


 L'angle avec le quai Carnot est traditionnellement occupé par une quincaillerie, qui existe déjà en 1865, sous le n° 46 et sous l'enseigne inattendue " A la Flotte anglaise ". Voici l'en-tête d'une facture de cette année-là. Les deux pays se sont rapprochés et la production britannique a la cote.

 Je pense que c'est le même magasin sur une facture de 1878. Mais il a désormais pris le n° 52 et un nouveau titre tout aussi original.

 





 




Première version du rond-point situé au débouché du pont Cessart


 Première version du rond-point, photographiée en 1986 - La place de la Bilange n'a pas échappé à son rond-point à l'anglaise, destiné à fluidifier la circulation. A Saumur, les urbanistes ont pendant 80 ans travaillé à la réalisation d'une grande percée rectiligne, qui faisait la fierté de la ville. Les impératifs de la circulation automobile amènent à briser ce grand axe. Mais il n'est pas nécessaire de le briser visuellement. Cette première mouture du rond-point, très élevée, coupait effectivement la perspective et était, en outre, dangereuse pour les voitures.

 

 
  

 
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